La Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eau

Dans les années 1980, la consommation de crevettes augmente fortement alors que les crevettes sauvages sont de moins en moins nombreuses. Les pays asiatiques (Thaïlande, Vietnam, Taïwan et Indonésie) se tournent alors vers l'élevage intensif à grande échelle. Ils sont bientôt suivis par le Brésil, l'Équateur et le Mexique.

La Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eauPhoto Pixabay

En 2017, la production mondiale de crevettes est de 3 000 000 de tonnes. L'Europe consomme 78% de crevettes issues d'élevages.

Problèmes écologiques et sociaux

Jusque dans les années 1970, l'élevage de crevettes est artisanal. Aujourd'hui, les exploitations sont passées de quelques hectares à des dizaines, voire des centaines d'hectares. La densité des crevettes peut aller jusqu'à 2000/m². Dans de nombreux pays, le développement de la pénéiculture se fait au détriment de la mangrove, surnommée forêt bleue, pourtant essentielle au maintien de la biodiversité littorale. À cela s'ajoute la pollution de l'eau et des terres côtières due aux résidus déversés dans les fleuves et la mer : déjections des crevettes, produits chimiques et antibiotiques. Dans ces fermes géantes, l'alimentation des crevettes est à base de farines animales d'origine terrestre et de farines de poissons.

Des problèmes sociaux, comme le non respect des droits des travailleurs, viennent s'ajouter au désastre écologique.

Élevage des crevettes en Thaïlande

La production de crevettes thaïlandaises augmente chaque année. Elle est passée de 279 000 T en 2014 à 330 000 T en 2017. Le pays compte 20 000 fermes réparties sur 34 000 Ha, 190 établissements de transformation, 65 % des usines sont de grande taille, 35 % de taille moyenne. Les espèces de crevettes sont à 96 % des penaeus vannamei (crevette à jambe blanche ou whiteleg shrimp) et 4 % des penaeus monodon (crevette tigre ou tiger prawn).

Au milieu des années 2000, l'introduction de la crevette panaeus vannamei permet une réduction des pathogènes viraux conduisant à une période de productivité soutenue. En 2011, la Thaïlande est le premier exportateur mondial de crevettes. Mais la même année, une épidémie de AHPND causée par la bactérie vibrio parahaemolyticus fait chuter la production de 63 % (220 000 T en 2015 vs 600 000 T en 2011).

Pour surmonter l'épidémie, les crevettiers thaïlandais modifient leurs fermes et les exploitent comme systèmes de circulation fermés : 1/3 des étangs servent de réservoirs, 1/3 sont consacrés à la production et 1/3 subissent un traitement biologique naturel.

Plus tard, la propagation d'un parasite fongique dans les crevettes encourage les crevettiers thaï à recycler et traiter l'eau biologiquement afin de réduire au maximum la prise d'eau à l'extérieur de la ferme.

Système biofloc

La technologie biofloc est un système de pisciculture alternatif qui recycle les protéines et convertit l'ammoniac en protéines microbiennes consommées par les filtreurs. Le biofloc augmente la proportion de protéines dans les aliments utilisés de 25 à 50 %, permettant ainsi aux aquaculteurs d'économiser de l'argent. D'autre part, les crevettes élevées dans un système biofloc retiennent mieux l'azote des aliments commerciaux. Enfin, les propriétés probiotiques naturelles du biofloc augmentent la résistance des crevettes à divers pathogènes.

Système low water

L'échange d'eau à grande échelle, généralement jusqu'à 20 % par étang par jour, a commencé à diminuer dans la culture de crevettes thaïlandaises au début des années 1990, en réponse à des vagues successives de maladies virales. À la fin des années 1990, des systèmes d'élevage de crevettes fermés sont en place partout en Thaïlande, habituellement avec un seul étang, car la plupart des fermes sont à petite échelle. Nous avons vu plus haut que les système de circulation fermé limite la propagation des maladies.

Pour conserver une eau propre à l'élevage des crevettes il faut qu'elle soit aérée. Si vous êtes déjà allé en Thaïlande, vous avez sûrement vu les aérateurs placés dans les bassins de crevettes. Au fil du temps, les crevettiers thaïlandais ont amélioré leur compréhension de la façon d'utiliser le placement directionnel des aérateurs à roue à aubes pour améliorer la circulation de l'eau dans les étangs et ainsi exploiter des unités de production de crevettes avec seulement un échange minimal d'eau. À cela, ils ont ajouté des drains centraux qui permettent de nettoyer les étangs.

La Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eauFerme à crevettes @thaietvousLa Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eauFerme à crevettes @thaietvousLa Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eauFerme à crevettes @thaietvous

Dans le même temps, la fréquence et le régime alimentaire sont ajustés pour être plus stables et réduire la fluctuation de l'oxygène dissous dans les étangs de grossissement. Les cycles de culture sont également raccourcis pour éviter d'aller au-delà de la capacité des étangs, comme cela s'était produit lorsque certains crevettiers thaïlandais poussaient leurs systèmes trop loin.

Conclusion

En résumé, la technologie biofloc couplée à un faible échange d'eau permet de limiter la pollution en réduisant les boues et les déchets des étangs. Elle permet également d'économiser l'eau et représente une méthode naturelle et peu coûteuse de traitement d'amélioration de la qualité de l'eau dans les étangs. Elle fournit simultanément une source supplémentaire de nourriture économique donc un système viable pour les crevettiers.

En savoir plus sur les mangroves

Les mangroves représentent un biotope irremplaçable. Leur destruction est une catastrophe écologique.

Ces forêts bleues sont d'une importance cruciale pour les communautés locales qui vivent sur la côte. Elles fournissent nourriture, bois de chauffe et de cuisine ainsi que matériaux de construction pour les maisons. Quant à leurs plantes, elles sont utilisées dans la médecine traditionnelle.

De plus, les mangroves protègent l'intérieur des terres contre les dégâts cycloniques et l'érosion. Première ligne de défense contre le réchauffement climatique, elles filtrent l'eau et stockent le carbone à l'instar des forêts terrestres. C'est grâce à ces écosystèmes uniques, classés sites Ramsar, que poissons et invertébrés migrent vers les récifs et la haute mer, ils s'y réfugient pour se nourrir et se reproduire. De même, les mangroves stabilisent et renouvellent les sédiments, elles absorbent les polluants et les excédents.

À Madagascar, elles assurent notamment la protection de la future nouvelle aire marine protégée de l'archipel des Iles Barren contre la sédimentation venant du versant ouest de Madagascar. Cet archipel constitue une des zones récifales les plus intactes de Madagascar et un des sites importants en terme de nidification des tortues marines dans l'Océan indien occidental.

La Thaïlande améliore la culture des crevettes à faible échange d’eauMangrove - Langkawi - 2007 @thaietvous

De même, les mangroves garantissent la protection de la zone humide de Manambolomaty (classée site RAMSAR), de la forêt primaire de Tsimembo ainsi que les plaines rizicoles de Bemamba et de Soahany contre tous les effets négatifs de l'augmentation du niveau de la mer issus du changement climatique.(source WWF)

Pour aller plus loin : https://www.fao.org/documents/card/fr/c/CB8926EN/ 1710_Brochure_Un_élevage_de_crevettes_resonsable_pour_satisfaire_la_demande_européenne.pdf

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