Nos enfants, ces petits francophones

Wizzboy qui ne voulait pas " speak la France " il y a encore un an, nous amuse beaucoup à parler comme ses copains aujourd'hui, ben ouais, hein. Il a tout du parfait petit français, des tournures de phrases au vocabulaire, et on trouve ça très mignon. On s'extasie aussi quand PrincesseChipie nous raconte son interro de grammaire, et qu'elle jongle avec les déterminants et les possessifs. On est tout ému quand les deux autres étudient Le Cid ou récitent l'albatros (de Baudelaire)...les gamins sont aussi surpris que nous quand on se met à déclamer spontanément avec eux. Enfin bref, pour la première fois de notre vie de parents, on a des enfants qui suivent la même scolarité que nous, dans la même langue et on ne sait pas trop comment le prendre. On n'a pas l'habitude.

Nos enfants, ces petits francophones

C'est évident banal pour beaucoup de gens, mais c'est tout nouveau pour nous. On apprend non seulement à être parents en France, mais aussi parents d'élèves francophones. Déjà, si on arrêtait de pousser des cris surexcités (hiiiii, je l'ai fait aussiii au collège ça, je suis allée au collège aussiiii) quand ces pauvres gosses nous racontent leurs journées d'école, je crois qu'ils apprécieraient. En tout cas, ils nous prendraient un peu moins pour des parents bizarres (quoique, d'après MangaGirl, on est irrécupérable et elle se trouve admirable de nous supporter avec autant de stoïcisme). Nos enfants suivent la même scolarité que nous, ils étudient les mêmes choses que nous, fini Shakespeare, coucou Molière, ils ont les mêmes rythmes (aaah, le mercredi, jour des enfants), les mêmes rites, les mêmes notations, les mêmes examens, les mêmes contrariétés et les mêmes réflexions que nous à leurs âges. Eux s'y sont habitués très vite, nous moins. On est encore bêtement (et agréablement, hiiii, j-a-do-rais Rimbaud aussiiiiii) surpris. On a passé des années et des années d'un côté à essayer de comprendre leur scolarité anglaise, et de l'autre à maintenir autant que possible un niveau de français et de culture française à la maison, et d'un coup, notre organisation devient caduque. Je suis ravie quand GeekAdo nous balance que Maupassant, c'est pas un comique (hiiiiii, il connaît Maupassant!!!!), mais je ne sais pas trop ce que je suis sensée faire (à part arrêter de hurler hiiiii, parce que vraiment, ils n'en peuvent plus).

On a aussi peur que cette francisation qui nous émeut autant, leur fasse oublier leur culture anglaise. Pour la langue, pas de souci, à part Wizzboy, ils passent spontanément à l'anglais dès qu'ils peuvent, y compris avec nous. Mais le reste? Est-ce qu'après des années à les ennuyer avec mes bouquins français, je dois leur faire lire les classiques anglais ? Est-ce que je dois transformer mes leçons sur l'histoire de France en exposés sur l'histoire anglaise? Et la culture populaire? Bon là, l'acclimatisation francophone a encore du chemin à faire. Maman, c'est qui N'Asterix? Maman, c'est quoi ce chanteur, he sounds creepy? (j'avoue, je ne sais pas non plus, d'ailleurs je n'ai même pas retenu le nom). L'humour pose aussi des problèmes, surtout à GeekAdo, qui a dû mal à apprécier les comiques français. Ce n'est pas qu'il ne comprend pas, c'est que ça ne le fait pas rire...en même temps, j'ai un peu le même problème. En fait, notre mode de vie s'est inversé, tout simplement. Il faut qu'on remplace tout ce qu'on faisait en anglais par du français et vice versa.

Et vraiment, vraiment il faut qu'on arrête de hurler (Bon d'accord que j'arrête, mais Maricheri était tout chose quand PrincesseChipie lui a récité le renard et le corbeau), il faut qu'on se mette dans la tête que oui, on a aussi étudié les mêmes choses qu'eux et que c'est normal, pas besoin de s'extasier comme ça. Hiii.