Going back to Brexitland for a few days…


Vous l’avez compris, Maricheri travaille encore à Londres. Il n’y va pas tous les jours, ça dépend des semaines, parfois 4 jours, parfois 2. Ça a été très difficile. Enfin non, soyons honnête, c’est toujours très difficile. Évidemment, en Angleterre, il partait quand on dormait toujours et il n’y avait que moi d’encore vaguement réveillée quand il rentrait. Maintenant, il peut accompagner les enfants à l’école, manger avec nous en semaine, participer aux jeux et aux goûters, on y a énormément gagné en qualité de vie familiale. Mais il y a aussi les soirs où il n’est pas là (ce qui lui permet de travailler 25 heures par jour d’ailleurs…), et on le vit très mal tous les deux. Enfin bref, la semaine prochaine, on va profiter des vacances scolaires: il repart pour 4 jours et je vais avec lui (message perso: et tu n’as pas intérêt à travailler 25 heures par jour!). On en est très content. Les enfants aussi puisqu’ils vont se faire gâter par Papy et Mamie (deuxième message perso: merci!). Maricheri va bosser, j’ai des trucs à faire, des gens à voir, mais on a bien l’intention d’en profiter. Youpidoo. Sauf que je vais retourner en brexitland pour la première fois depuis des mois et je ne sais pas trop comment le prendre.

Going back to Brexitland for a few days…

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Quand il est à Londres, Maricheri est dans sa bulle (encore les 25 h de boulot par jour…), il travaille dans un milieu très international où il est presque incongru de croiser un anglais. Il n’a pas le temps (ni l’envie) de se pencher sur la vie en brexitland. Il suit plus l’actualité anglaise quand il est en France en fait. Et puis, comme il dit, les brexiters sont certes très courageux, mais il y a peu de chance qu’il se fasse apostropher dans la rue ou le métro du haut de ses 6m08 (évidemment, j’exagère un peu, mais ceux qui le connaissent, savent que c’est presque ça) avec son physique de pilier de rugby et son air avenant d’oursin enragé. Il n’a aucune interaction avec qui que ce soit en dehors du boulot et des douaniers qui le reconnaissent maintenant. Il est à Londres comme il serait n’importe où en voyage d’affaire, ça ne le concerne pas. Il a tiré un trait sur l’Angleterre, c’est fini, voilà. Je suis moins tranchée.

Je ne sais pas du tout comment je vais le prendre, comment je vais vivre de retourner à Londres en touriste. Retourner dans ce pays qui était chez moi, que j’avais choisi, que j’ai profondément aimé et qui m’a rejeté, ce pays qu’on a fuit…c’est très bizarre. Je suis quand même toute excitée, j’ai une liste de choses à ramener longue comme tout. Parce que oui, beaucoup de choses très british me manquent, tout comme on ramenait pratiquement un semi remorque de franchouillardises en tout genre quand on rentrait de vacances en France. Rien que ça d’ailleurs me prouve si il y avait besoin, que je suis toujours émotionnellement entre deux pays. Je me demande quel effet ça va faire, d’être en vacances, de passage dans un pays dont je ne pensais jamais partir il y a encore 2 ans. Ce n’est pas comme l’Irlande, on y est toujours très attaché. On a choisi d’en partir, on est ravi d’y retourner en vacances. Là, c’est différent. J’ai toujours l’impression d’avoir été poussée dehors. Je ne veux pas revoir notre maison, repasser dans notre village, notre rue, devant l’école des enfants…ça fait encore mal.

Est-ce que le douanier va me poser des questions? C’est de plus en plus courant, malheureusement. Qu’est-ce que je vais faire en Angleterre? Est-ce que je vais pouvoir répondre que je viens en touriste sans pincement au cœur? Comment je vais réagir devant les étals des vendeurs de journaux, qui ruissellent de unes haineuses contre les étrangers en général et les européens en particulier? Est-ce que je vais toujours me sentir visée? Après tout, je ne suis plus une de ses EU migrants qu’ils dénigrent à longueur de titres ignobles, je ne suis qu’une touriste. Mais je le suis devenue entre autres, à cause cette atmosphère irrespirable de xénophobie triomphante. Elle m’a fait fuir ce que je croyais être mon chez moi, est-ce que je vais pouvoir l’ignorer? Est-ce que la joie de revoir des amis, de retrouver certains lieux londoniens va être suffisante? Est-ce que je vais arriver à faire comme Maricheri, à ne plus y voir qu’un endroit de passage avec qui je n’ai plus aucun lien affectif? Bien sûr, on va en profiter, passer du temps juste tous les deux, mais pas comme d’habitude quand on part découvrir une nouvelle ville.

Je ne sais pas trop quoi penser, c’est très bitter sweet comme sentiment. Les dernières news concernant le brexit ne sont pas engageantes non plus, ça n’aide pas. Voilà, je retourne en Brexitland en touriste pour quelques jours et je ne sais pas comment je vais le vivre, je suis contente mais ça me fait un peu peur. To be continued, I guess…