Thursday thunder: Ready to leave?


Hier, on a passé la journée en France, sous une tonne de paperasses, encore une fois. En fait, on est allé de très nombreuses fois en France ces derniers mois, pour préparer notre départ, enfin notre arrivée. Les enfants sont excités, heureux de partir à l’aventure, de découvrir vraiment un pays qu’ils ne connaissent qu’a travers les vacances. Ils sont impatients. GeekAdo se renseigne à fond sur le système scolaire français, il voit tout ça comme une extraordinaire opportunité. Il sait aussi que ça lui ouvre la porte à toutes les universités européennes grâce à Erasmus, porte qui risque bien de se fermer bientôt sur les étudiants britanniques. Wizzboy est le seul qui ne soit pas impatient, il ne comprend pas vraiment ce qui se passe et est un peu inquiet. Mais on lui a promis une plus grande chambre et qu’il pourra la décorer avec des stickers de fireman Sam partout. Il est ravi. Maricheri est tout content aussi. La seule qui ne trépigne pas d’impatience, c’est moi. Le problème, c’est que je n’arrive toujours pas à voir notre déménagement comme une arrivée, je suis coincée mentalement sur le départ.

Thursday thunder: Ready to leave?

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Je l’ai déjà dit, mais c’est la première fois que je pars de quelque part. J’ai changé plusieurs fois de pays, j’ai même fait des études pour ça. J’ai toujours eu envie d’aller voir ailleurs, jamais celle de quitter où j’étais parce que ça ne me convenait pas. J’adore l’Irlande et pourtant on a décidé d’aller en Angleterre. Pour découvrir l’Angleterre, pas parce que l’Irlande ne nous plaisait pas. Cette fois, je pars pour partir, à la limite peu importe la destination du moment qu’on ne reste pas en brexitland. C’est un chouïa moins motivant que nos autres déménagements. Je veux juste partir. Je ne décolère pas de ces 18 derniers mois, devant ce pays que j’avais choisi et que j’aimais devient, devant l’apathie générale, devant la montée des pires xénophobies, devant l’abdication du soi disant plus vieux parlement du monde face à un gouvernement incapable aux tendances antidémocratiques et c’est un euphémisme. Le brexit me bouffe la vie, joue sur ma santé, grignote les nuits. J’étais déjà une news addict, mais maintenant, je passe mes journées à décortiquer la presse. L’Ado se moque, me traite de keyboard warrior parce que je reste des heures et des heures sur les RS à faire ce que je peux, pas grand chose, mais participer à mon petit niveau. Parce que tout ce que je vous raconte depuis des mois me dégoûte, me révolte, me donne des nausées et qu’on ne peut pas rester sans rien faire.

Je voudrais retrouver la vie d’avant mon Angleterre d’avant, celle où je me sentais si bien. Mais même si le brexit était annulé demain, le charme est rompu. Je n’ai plus confiance. Je n’ai plus envie de vivre ici. Évidemment, si ce n’était que ça, on resterait, on ne s’amuse pas à perturber comme ça la vie de nos enfants pour le plaisir. Je ne vais pas vous embêter avec les détails techniques, chaque cas est particulier, mais nos enfants, même ceux nés ici ne rentrent pas exactement dans les nouvelles cases du home office, le ministère de l’intérieur qui décide du sort des européens. Alors on préfère prendre les devants. Mais bon, malgré les circonstances, c’est quand même une nouvelle aventure qui commence pour notre famille. Les enfants et Marichéri sont à fond. Pas moi. Ça m’énerve, je suis coincée mentalement sur le départ, je n’arrive pas à me projeter vers la suite. D’habitude quand on déménage (4 pays et 15 logements différents en 22 ans de vie adulte), je suis une vraie sale gosse qui trépigne d’impatience, je fais des tas de plans pas forcément réalistes pour la suite, j’attends avec gourmandise notre nouvelle vie, tout ça. Là, je suis bêtement soulagée de quitter brexitland, un peu inquiète pour la suite, mais sans m’y projeter du tout. Voilà. Ça ne va pas du tout, c’est mou tout ça. Je me contrarie moi même de ce manque d’enthousiasme. Je me sens toute terne. Beuh. Un déménagement, surtout en changeant de pays, ça doit être excitant, plein de possibles, ça doit me faire rêver. Ça m’a toujours fait rêver…alors le côté  » je suis soulagée », « c’est la moins mauvaise solution », franchement, c’est moyennement inspirant! Je ne me reconnais plus…

Mais bon, si j’ai perdu (momentanément j’espère) mes capacités d’enthousiasme dignes habituellement d’une sale gamine de 4 ans hystérique et bourrée de sucre juste avant Noël, j’ai encore ma mauvaise foi. Tout ça, c’est la faute des brexiters! Na. En 18 mois, ils m’ont tellement fatiguée, stressée, minée, terrifiée, écoeurée, épuisée…ils m’ont gâché la vie et ils me gâchent notre départ. Ça m’énerve…cela dit, je sens quand même que je commence à reprendre un peu d’énergie, non?