Portrait de Lina, expatriée à Sharjah

Ce billet s’inscrit dans une série d’articles dressant le portrait de femmes vivant aux Émirats Arabes Unis. Provenant de différents pays, ces femmes ont des trajectoires de vie différentes : certaines travaillent, d’autres sont mères au foyer; certaines sont musulmanes, d’autres catholiques ou athées. Mais au-delà de leurs traits distinctifs, ces femmes ont une caractéristique commune : ce sont des mamans qui vivent ou ont vécu une expatriation en famille dans l’un des sept émirats.

Pour débuter cette série, je vous propose de découvrir le portrait de Lina, qui a accepté de répondre à quelques questions au sujet de sa vie comme expatriée dans l’émirat de Sharjah.

Bonjour Lina, peux-tu te présenter brièvement (âge, pays d’origine, profession, nombre et âge de tes enfants)?

Bonjour, j’ai 29 ans et je suis originaire de la Belgique. Je suis une mère au foyer comblée : j’attends mon troisième garçon pour le mois d’août, mes deux premiers ont 7 et 4 ans.

13009971_263750027300362_640705564_oLina, qui n’aime pas beaucoup se faire photographier

Pourquoi avoir choisi de t’expatrier aux Émirats Arabes Unis et, plus spécifiquement, à Sharjah? Est-ce que c’est ta première expérience d’expatriation?

Nous attendions ce moment depuis quatre ans, on n’y croyait plus. Nous avons séjourné au Bahreïn pendant un mois avant de choisir les Emirats Arabes Unis. Nous voulions quitter la Belgique pour un pays musulman. Je me suis moi-même convertie à l’islam il y a 10 ans. Un jour, le téléphone a sonné et cette seule et unique fois fut la bonne : mon mari avait décroché un poste à Dubaï!

Nous avons malgré tout fait le choix de vivre notre première année d’expatriation à Sharjah, après avoir visité les émirats de Dubaï et d’Ajman. Ce choix s’explique par différentes raisons. D’abord, nous aimons son côté plus familial. Ici, il n’est pas rare de voir des familles se poser dans les nombreux parcs pour y passer la soirée. Nous apprécions également le côté plus « conservateur » de Sharjah, où il n’y a pas d’alcool, de bars ou de discothèques… Mais ce n’est pas pour autant qu’on ne s’y amuse pas! Sharjah offre de nombreuses terrasses où passer un bon moment. Finalement, ce fut aussi un choix financier, car nous voulions évaluer notre budget pour cette première année d’expatriation. À Dubaï, tout est excessivement cher, alors que les loyers et les sorties sont plus abordables à Sharjah. Sans compter que l’émirat possède beaucoup de musées, de parcs, et de lieux de loisirs qui sont gratuits ou à très faible coût.

Comment s’est passée ton installation à Sharjah? Est-ce que tu y habites depuis longtemps?

Nous sommes dans notre première année d’expatriation. L’installation n’a pas été facile et les démarches ont été contraignantes. Nous avons opté pour la solution du conteneur pour rapatrier nos affaires, en prenant un transporteur et non pas un déménageur. Nous avons donc dû faire les démarches administratives pour récupérer nos biens. Ensuite, les visites d’appartements se sont multipliées. Avec les enfants, il n’est pas facile de visiter trois émirats en peu de temps pour trouver l’endroit qui plaira à tous, surtout lorsque le papa travaille toute la journée. En même temps que la réception du conteneur et les visites de logements, nous devions faire des démarches auprès des banques et chercher une école pour les enfants. Un vrai parcours du combattant !

13020229_263750290633669_2003686946_nL’immeuble de Lina offre une belle vue sur le lagon et l’oasis Nakheel Peux-tu me décrire une journée typique de ta vie à Sharjah?

Le matin, le bus scolaire passe chercher mes enfants vers 7h00. Je pars ensuite en direction du marché couvert de Jubail pour faire quelques courses afin de préparer le déjeuner des enfants ainsi que le dîner. Parfois, nous aimons nous retrouver entre femmes et il n’est pas rare de nous retrouver à Majaz Waterfront ou à la Qasba pour prendre un bon petit-déjeuner entre mamans. Puis, vient le temps de la prière, la mosquée Noor raisonne à deux pas de chez moi. À 13H15, le bus me ramène le plus petit, suivi à 15h30 de mon aîné. Nous faisons les devoirs sur la terrasse de l’immeuble, face au Khalid lagoon et nous nous relaxons ensuite à la piscine ou dans les jeux du parc Majaz. J’aime cette nouvelle vie!

12988013_263756653966366_1704089063_nLa corniche de Sharjah

Qu’est-ce que tu aimes le plus de ton expérience à Sharjah?

J’aime la population qui y vit, l’ambiance qui y règne, le mélange de cette culture arabe et de toutes les autres qui coexistent. J’aime voir ces familles, de l’arrière-grand-mère à la petite fille, qui se posent sur un tapis pour boire un café et manger ensemble sous les palmiers de l’Oasis Al Nakheel. J’aime le fait qu’ici, toutes les religions se côtoient sans se faire la guerre. À l’approche de Noël nos voisins installent des guirlandes lumineuses à leurs fenêtres; à l’Eid, tout le monde achète son mouton. Nos voisins sont Indiens, Libanais, Syriens et Pakistanais. A Sharjah, ainsi que dans tout le pays en général, on entend différentes langues, on peut manger un Biryani ou un Shawarma, comme une pizza. C’est très enrichissant pour les enfants d’être exposés à tant de culture différentes.

Pour ma part, le fait de vivre à Sharjah facilite la pratique de ma religion. Je peux prier peu importe où je me trouve, dans un centre commercial ou au bord de la route, manger hallal à chaque coin de rue et me vêtir comme je le souhaite. Ici, une femme peut être médecin ou femme d’affaires et porter le niqab, le hijab ou l’abaya, tout comme les non-musulmans ont la liberté de se couvrir ou non dans le respect des habitants et des lois de l’Émirat.

Quels chocs culturels (ou difficultés) as-tu rencontrés depuis que tu es expatriée?

Honnêtement, je n’ai pas encore vécu de difficultés ou de chocs culturels. Ici, chacun vit en harmonie avec son voisin. C’est très agréable. J’avais une appréhension quant aux locaux, les Émiratis. En Europe, on pense souvent que les Emiratis sont assez froids et pas très sympathiques. À mes yeux, c’est une erreur, car ils sont agréables et accueillants avec nous. Par exemple, les femmes sont très gentilles et serviables dans l’administration.

En tant que femme dans un pays musulman, as-tu été contrainte de faire des changements dans tes habitudes de vie? Si oui, lesquels?

Etant musulmane, ma vie ici n’est que plus facile. Je voulais quitter la Belgique en partie pour les tensions qui existent actuellement envers les musulmans dans l’ensemble de l’Europe.

Quels sont tes trois lieux préférés à Sharjah?

Seulement trois? Ce n’est pas facile de choisir.

  • L’Oasis Al Nakheel, un grand espace vert le long de la corniche, où l’on peut pique-niquer et lire à l’ombre des palmiers pendant que les enfants jouent.
  • La Qasba, qui est un bâtiment plus traditionnel, loin des buildings géants, et qui propose des restaurants, des cafés et des activités pour les enfants. Il est même possible de monter dans la grande roue qui surplombe l’émirat ou de faire un tour en pédalo le long du canal.
  • La mer d’Al Khan, une petite plage charmante qui offre de nombreuses activités (ex. kayak, banana boat) et qui possède une cafétéria, une petite plaine de jeux pour les enfants, des douches ainsi que des parasols et des transats (disponibles pour 10 AED seulement).

Qu’est-ce qui te manque le plus de ton pays d’origine depuis que tu es expatriée?

Ma famille … Oh oui, ma famille! A 6h30 de vol de Bruxelles, ce n’est pas facile de visiter mes proches plusieurs fois par année et chaque voyage est un déchirement. Puis, peut-être aussi nos bonnes frites belges!

Pour finir, quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux femmes qui souhaitent vivre une expatriation familiale à Sharjah ?

Primo, surtout de ne pas baisser les bras, la patience est de mise. Secundo, de ne pas foncer tête baissée parce que l’on voudrait à tout prix partir. Ici, la vie a un coût beaucoup trop élevé (école, loyer, frais médicaux, etc.) pour se permettre de tout quitter et de risquer de se retrouver à la rue. Une expatriation réussie est une expatriation qui se prépare, avec des contrats et des signatures avant de partir et pas une fois sur place. Trop nombreux sont les Européens qui viennent aux Émirats et se retrouvent dans une galère pire qu’à leur arrivée.

Attention ici, il est très facile de devenir paresseux, tu ne sors plus de la voiture pour faire un plein, tu ne ranges plus tes courses… Si tu oublies ne serait-ce qu’un pot de yaourt à l’épicerie, on te le livre sans problème. Même chose si tu as l’envie soudaine de manger un burger  à 2h00 du matin. Bref, on prend vite l’habitude de ne plus bouger et ça se ressent… J’ai pris 6 kilos depuis notre arrivée… Mais qu’est-ce que c’est agréable!

12966633_263755590633139_426434744_nSharjah by night

Merci Lina d’avoir accepté de nous partager ton expérience d’expatriation à Sharjah. Je réalise que je n’ai pas suffisamment passé de temps dans cet émirat, qui semble avoir beaucoup à offrir aux familles. J’y retournerai avec plaisir lors de notre prochaine visite à Dubaï!