Cache-cache à la caserne

Cache-cache à la caserne

Photos : Magali F. Fouquet

Avec M. photographe de haut vol, nous étions parties très tôt un matin d’été en direction des régions septentrionales de Berlin. Nous avions un programme bien chargé avec plusieurs lieux à visiter.

Le premier fut une déception, un jardinier était en plein travail sur le terrain où se trouvait le magnifique bâtiment que nous voulions explorer. Même s’il nous laissa très gentiment entrer dans la propriété, impossible de pénétrer dans l’édifice en lui-même, toutes les issues étaient méticuleusement fermées. Et je dois avouer que, le jardinier se trouvant à proximité, j’avais encore moins de courage que d’habitude pour tenter une incursion, contrairement à M.

Nous visitâmes ensuite une espèce de parking abandonné, du moins c’est ce que nous déduîmes au vu de la structure de ce lieu rongé par la nature dont M. tira de très belles photos.Nous allâmes aussi nous perdre dans un village doté d’un étrange centre de vacances, je vous en ferai part dans un prochain article.

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Mais le lieu qui allait nous occuper une grande partie de la journée c’était Vogelsang. Au milieu d’une forêt où l’on entend effectivement le chant des oiseaux, cette caserne soviétique abandonnée depuis 1994 allait nous faire vivre bien des aventures avant de nous livrer ses plus beaux secrets.

La caserne fut construite en 1959. Elle aurait notamment abrité dans ses entrepôts des missiles nucléaires. Plus qu’un espace militaire Volgelsang était une vraie ville de près de 15000 habitants qui vivait presque en autarcie avec ses logements, son école, son cinéma, ses salles de sport… Cette cité qui fut l’une des casernes les plus importantes à l’extérieur du territoire de l’Union Soviétique était inaccessible à la population allemande locale. Depuis le départ des armées soviétiques en 1994 la forêt de Vogelsang a retrouvé son calme… ou presque.

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Grâce aux soigneuses recherches de M., il ne fut pas trop difficile de trouver la caserne au milieu de la forêt. Nous croisâmes d’ailleurs un adepte d’urbex qui en sortait et se dirigeait vers sa voiture de sport. Il nous assura qu’il y avait peu de risque de se faire coincer à l’intérieur. Sur le sentier forestier relativement fréquenté nous rencontrâmes des promeneurs et leurs chiens. Puis une première petite habitation presque enfouie sous la végétation et la terre. Il suffisait de passer par l’un des nombreux trous béants du grillage pour s’en approcher. Le problème n’était pas vraiment d’entrer dans l’enceinte de la caserne, mais plutôt de s’orienter. Heureusement que M. avait pris des photos des plans qu’elle avait trouvés ce qui nous permis de nous y retrouver.

Plus nous approchions de ce qui nous semblait être le centre de la caserne, plus le bruit des oiseaux était couvert par celui d’un chantier. De fait, des ouvriers étaient affairés à la démolition de bâtiments, une tâche qui semble presque infinie étant donné la taille du lieu. La grande distraction des travailleurs semblait être de rouler à grande vitesse sur les sentiers forestiers ce qui nous permettait de les entendre au loin.

Ce fut donc une exploration cache-cache durant laquelle il fallait régulièrement se faire discrètes et éviter les chemins principaux sur lesquels pouvaient débouler à tout moment les engins du chantier. Après de premières habitations nous atteignîmes le secteur plus militaire gardé par une guérite sans sentinelle. Nous vîmes de nombreux hangars, peut-être ceux qui furent utilisés pour entreposer les missiles. Des panneaux indiquaient que la zone était dangereuse, restait-il des matériaux nocifs ou bien encore des espaces piégés ? Mon imagination commençait à s’agiter.

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Nous marchâmes des heures à travers les hautes herbes balayées par le soleil, parcourant les escaliers des immeubles toujours identiques, en général totalement vides et délabrés. Une pause dans les sous bois s’imposait. Nous pensions qu’une fois 17h passée, la caserne serait à nous, les ouvriers étant censé terminer leur journée à cet horaire. Mais les aller-retour des camions ne cessaient pas, de même que les échos de démolition. C’est donc prudemment qu’il fallait progresser en leur direction, car c’est là que se trouvaient les bâtiments les plus intéressants.

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Une école au plancher pourri dans laquelle un escabeau et des dessins sur les murs étaient les seules traces de la fonction d’origine du bâtiment.

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Une salle des sports où un vélo avait pris sa retraite.

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Des cabanes en bois qui devaient être utilisées comme sauna.

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Et enfin un super cinéma dans lequel les chaises montent sur scène et les spectateurs se résument à quelques graffitis grimaçants.

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Le soleil se couche, les ouvriers sont enfin partis, et nous sommes encore happées par une bâtisse à la décoration somptueuse : des tapisseries aux motifs colorés et géométriques qui rendraient fous n’importe quelle personne saine d’esprit qui y passerait trop de nuits.

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Le sentier forestier s’assombrit lentement, il est temps de quitter la forêt, les oiseaux ont fini de chanter.