Thursday Thunder: the brexit show

Publié le 11 juillet 2019 par Pomdepin @pom2pin

C'est beau la démocratie en action. Vraiment, c'est magnifique, un pays qui se libère de l'esclavage européen (selon une sombre conne sénile députée) pour reconquérir son empire colonial éblouir le monde entier ébahi devant autant de démocratie. Ou pas. Quelqu'un peut m'expliquer en quoi c'est démocratique que seul 0,3% du corps électoral ait le droit de désigner le nouveau chef du gouvernement, issu d'un parti qui n'a pas la majorité (les conservateurs ont dû passer un accord de coalition avec les fachos unionistes Nord irlandais pour accéder au pouvoir) et qui est arrivé quatrième lors des dernières élections? Vraiment, je ne comprends pas en quoi c'est plus démocratique que l'élection du parlement européen. Mais je ne suis pas brexiteuse non plus, c'est peut être ça. Comme l'a dit Boris Johnson, le grand gourou et favori des adeptes de la secte brexiteuse, il n'y a pas d'explication à donner, c'est comme ça, il suffit de croire. Le brexit, religion d'état.

Tous les sondages sont formels, une majorité de britanniques ne veut pas ou plus du brexit. La moitié de la population, affolée par les dernières prévisions et les débuts de pénurie de médicaments vitaux, fait des stocks. Les conservateurs se prendraient une claque historique si il y avait des élections générales demain. Un ancien premier ministre (John Major), pourtant toujours très modéré dans ses propos, voire transparent, est vent debout contre le futur chef du gouvernement, issu du même parti. Il menace de le traîner en justice. Qu'est-ce qui a pu énervé quelqu'un d'une discrétion absolue, qui a depuis des décennies, la réputation d'avoir la personnalité d'une endive bouillie? Qu'est-ce qui pousse des députés conservateurs à déposer proposition de loi sur proposition de loi pour contrer un premier ministre du même parti qu'eux? Oh, un tout petit rien. Une broutille. Comme les brexiters et Boris Johnson sont très attachés à la démocratie parlementaire britannique, à la démocratie tout court, ils menacent juste de suspendre le parlement pour brexiter tranquillement. C'est tout. Comment ça, un coup d'état législatif? Mais pas du tout, puisqu'on vous dit que c'est pour le bien la démocratie britannique! C'est évident, pour défendre quelque chose, il faut l'écraser sans pitié. Il y a des précédents historiques, en Allemagne par exemple. Si vous n'êtes pas d'accord, pas de soucis, on vous fera disparaître dans la grande purge qui a déjà commencé. L'ambassadeur de la Grande Bretagne aux USA a été démissionné pour avoir fait son job par quelqu'un ( Johnson) qui est pas encore officiellement au pouvoir pour faire plaisir à Trump. Tout va bien. C'est ça, " reprendre le contrôle " à la façon des brexiters, c'est obéir sans broncher comme un gentil petit toutou aux dictats d'un dirigeant étranger plutôt que de participer aux prises de décisions d'une alliance avec ses voisins.

Sérieusement que se passerait-il en France si le président de la république était désigné par les membres extrémistes d'un parti minoritaire, sans que les électeurs soient consultés? Si il annonçait son intention d'éradiquer le parlement? Si les hauts fonctionnaires étaient choisis, ou du moins cooptés par Trump? Si le chef du gouvernement reconnaissait que pour promouvoir son idéologie minoritaire pourrie, il fallait mettre à genoux l'économie pendant 30 ans, faire exploser le chômage, et céder un tiers du territoire national? Parce que le concurrent de Boris Johnson, Jeremy Hunt, le dit aussi. Pour brexiter, c'est pas grave de se séparer de l'Ecosse et de l'Irlande du Nord. C'est pas grave que des centaines de milliers de pauvres malheureux se retrouvent au chômage, que d'autres meurent parce qu'il n'y a plus de médicaments. Ce sont des sacrifices qu'ils sont près à faire, bien au chaud dans leur résidence de Downing Street pour atteindre le glorieux brexit. Ce ne sont pas des sous entendus, des confidences en off. C'est le discours politique assumé, télévisé, claironné haut et fort par les deux prétendants au trône brexiteur dont l'un sera premier ministre d'ici quelques jours. C'est hallucinant. Et personne ne manifeste. Rien. Même ceux qui sont persuadés d'aller au chaos, continuent d'avancer sans broncher...pourquoi? C'est sidérant.

Peut-être que John Major arrivera à bloquer son successeur à temps, peut-être que les députés résisteront, peut-être que les anglais se réveilleront de leur torpeur passive. Peut-être pas. J'ai très peur pour mon Angleterre qui n'a jamais été aussi près du précipice. Welcome to Brexitland.