In 2018, we did…


Il y a exactement un an, alors qu’on préparait notre départ et que j’étais partagée entre incrédulité et nostalgie, angoisse et soulagement, je faisais la liste de tout ce que nos enfants n’allaient pas faire en 2018 à cause du déménagement. Ça s’est confirmé évidemment, mais j’y reviens aujourd’hui avec tout ce qu’ils ont effectivement fait. Ils m’ont bluffée.

In 2018, we did…

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En 2018, GeekAdo n’a pas passé ses GCSE, les examens de fin de collège, qui ressemblent un peu au bac. Les GCSE (General Certificate for Secondary Éducation) se passent à la fin du collège, soit à 16 ans. Tout le monde passent les core subjects, les matières principales: anglais, littérature, maths, histoire ou géo, sciences et une langue vivante. On peut ensuite rajouter autant d’options qu’on veut. Toute sa scolarité et surtout ses années de collège étaient tournées vers ça…en même temps il n’était pas forcément déçu d’y échapper. Mais en 2018, GeekAdo a découvert le lycée français, ses filières compliquées, son organisation qui lui a paru d’abord incompréhensible, sa masse étouffante de devoirs à la maison, sa pédagogie surprenante pour un anglais. Et puis il s’y est fait. Il a apprécié de continuer à faire de l’histoire même en choisissant maths. Il a aussi été ravi d’avoir un an à attendre pour son premier exam (le bac de français se profile cette année…). Il a découvert l’avantage d’être bilingue en section européenne, il en est très content. Il approuve totalement le système de notation et sa moyenne pondérée qui lui permet de compenser ses lacunes en français avec les maths et les sciences, alors qu’en Angleterre, chaque matière compte séparément.

En 2018, il n’est pas allé à sa prom night, cette soirée endimanchée qui marque la fin du collège. Il n’a pas eu pas besoin de mettre le noeud papillon qu’on avait acheté pour L’Ado. Pas de limousine de location, pas de bières tièdes bues en cachette avec les potes, pas de copine déguisée en poufiasse (oui, ça ressemble vraiment à ce qu’on voit dans les mauvais téléfilms pour boutonneuses niaises). Mais il a bu du vin chaud sur les marchés de noël avec ses nouveaux potes. Il a découvert la savate, la lutte française (ou boxe française, je ne sais pas comment on dit, honnêtement, ça m’enthousiasme beaucoup moins que lui). En 2018, GeekAdo n’a pas eu de cérémonie de remise de diplôme, pas d’interview pour les 6th forms, enfin rien de ce qui constitue de véritables rites de passages incontournables pour les ados anglais et qu’il attendait depuis des années. En 2018, GeekAdo n’a pas eu de year book, pas de t-shirt souvenir de sa promotion de collège…mais il sait que ça viendra en 2020. En 2018, il est allé voir des salons d’étudiants, il a été agréablement surpris de la simplicité de parcours sup comparé au UCAS anglais (on verra dans quelques mois si il pense toujours ça, une fois qu’il y passera, mais c’est un bon début). En 2018 il s’est extasié de toutes les possibilités qui s’ouvrent à lui, y compris Erasmus, que ses anciens petits camarades anglais n’auront plus. Bref, en 2018, GeekAdo a découvert la première S, les écoles de commerce et les joies des bulletins à la française. C’était pas gagné au départ, mais il y sent très bien aujourd’hui.

En 2018, PrincesseChipie n’est pas rentrée en year 6, en dernière année d’école primaire anglaise. Elle n’a pas passé le eleven plus, l’examen d’entrée pour les très sélectives grammar schools, alors qu’elle était l’espoir de son école. Elle n’a pas préparé les SATS, les examens de fin de primaire, alors qu’elle en riait d’avance. Elle n’a pas visité des collèges, on n’a pas rempli de dossiers d’inscription en croisant les doigts pour que ces cretins du county council ne se plantent pas et la laissent bien aller dans le même collège que sa sœur…en 2018, elle est passé en CM2, elle sait qu’elle restera dans le même établissement jusqu’au bac, et qu’elle sera en section européenne aussi. Elle s’est éclatée: s’adapter à un nouveau système scolaire, ça lui a enfin fait un challenge! Elle croyait qu’elle n’irait pas en semaine verte, ce un rite de passage qu’attendent tous les petits anglais en primaire. Et bien si, elle ira bientôt. Et en 2018, elle a eu droit à un séjour en Angleterre (où elle a passé son temps à faire l’interprète, y compris pour les adultes, elle était ravie) et des sorties éducatives à n’en plus finir. En 2018, Princessechipie n’a pas auditionné pour le rôle titre de la xmas play alors qu’elle attendait depuis 3 ans d’être enfin dans la classe des grands pour pouvoir le faire. Mais en 2018, elle a fait répéter tous les CM2 qui devaient chanter « jingle bells rock » à la fête de Noël. Pour le grand jour, elle était devant au milieu sur scène, bien en face du micro, et elle bramait fièrement à pleins poumons pendant que les autres susurraient en yaourt. En 2018, PrincesseChipie n’a pas commencé à préparer sa leavers assembly, ce grand moment que les petits anglais attendent depuis leur premier jour de primaire. Mais elle a fait carnaval à l’école, et elle a découvert la kermesse…

En 2018, Wizzboy n’a pas appris à lire. Il était déjà en primaire en Angleterre, ça commence à 4 ans. Mais en 2018, il a vraiment appris à « speak la France ». Et il a continué à faire des additions simples, déchiffrer des phonèmes, écrire de plus en plus (ses instits ont été formidables). En 2018 il n’a pas eu sa giant spiderman birthday party avec tous ses potes anglais dont il parlait depuis des mois. En même temps, je ne suis pas sûre que les parents auraient laissé leurs gosses venir chez les sales migrant européens, vu les précédents avec les filles…mais justement, en 2018 il a été invité à des anniversaires, il a plein de copains français. Il a une vie sociale normale, personne ne le met à l’écart à cause de la nationalité de ses parents. Il a adoré tout ce qu’il fait à l’école. En 2018, KnightyDiva n’a pas été réélue form captain, première marche en route pour être prefect, voire headgirl, c’était son but. Mais en 2018, elle s’est rendue compte que le système scolaire français lui correspond bien mieux que l’anglais. Elle a compris aussi que la course à la popularité effrénée pour être head girl ne servait à rien ici surtout que franchement, on peut juste être déléguée de classe et c’est nul, qui a envie de se taper les conseils de classe? Du coup, en 2018, elle a arrêté de vouloir plaire à tout le monde et elle s’en porte bien mieux.

En 2018, on a changé de pays, on a fuit brexitland et ça a été très difficile à vivre. En 2018, nos enfants sont devenus des expats, des anglais en France comme nous étions des français en Angleterre. Ils sont toujours bilingues, biculturels et contents de l’être. Ils ont découvert, apprécié, intégré leur nouvelle vie. Ils se sont adaptés, avec curiosité, avec joie, ils sont devenus bien plus français qu’ils ne l’avaient jamais été tout en gardant leur côté British. Ils m’ont impressionné.