Sur la route de Jaipur

© Roland Meige © Roland Meige

Moloni, Rajasthan, Inde / 26°34’N 76°58’E / 1982
La tête pleine des exercices cérébraux qu’imposa la formidable géométrie de Fatehpur Sikri, nous regagnons la voiture, l’Ambassador noire, sa banquette de simili-cuir rouge et brulant. Il fait chaud, nous luttons contre l’assoupissement qui pourrait nous atteindre sans préavis.
Le plat paysage défile, les dernières surfaces cultivées avant le désert, irriguées, irrégulièrement, par la Banganga. Celle-çi tributaire de la Yamuna; parce qu’il en existe d’autres, homonymes, ailleurs dans les plaines du sous-continent.
A contre-jour, j’aperçois, à l’écart de la route, derrière de hautes graminées scintillantes, autour desquelles déambulent prétentieusement quelques paons, la silhouette d’un village. De l’habitat de pisé modestement groupé sous de gros manguiers. Je questionne illico Mr Upadhyay : Oui, allons-y, «let’s have a glance». Pandit U. est un charmant senior, ingénieur en retraite, qui officie épisodiquement comme guide; nous avons le plaisir de voyager en sa compagnie depuis quelques jours. Cultivé, polyglotte, discret, il est en l’occurrence le fixeur idoine pour aborder ce petit village.
Nous y sommes bien accueillis, on mande rapidement un responsable. J’alterne questions de genre tiermondiste salonard (accès à l’eau potable, évacuation des eaux usées, santé publique, éducation, construction – et non, je ne crois pas, tout de même, avoir osé parler «gouvernance») et cadrage de scènes bucoliques. On répond gentiment et on me laisse me balader avec mon appareil au cou; il me faudra même poser, assis sur un charpoy, à côté du chef du village, entouré de quelques comparses et de marmaille.
Ce sont des images de l’Inde rurale éternelle que je capture, qui viendront, sur la pellicule, faire suite, immédiatement, à celles de Fatehpur Sikri ; témoignage, elles, d’une société hautement sophistiquée. «L’Inde, terre de contrastes», en quelques décimètres de celluloïd.
Puis nous reprenons la route, la route de Jaipur.
Le chauffeur, la lippe rouge écarlate du jus de bétel, réglant son rétroviseur pour reluquer, encore, F.

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