Mappe-Monde

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Paris / longitude 0 / 1876
La carte dont un extrait figure en arrière plan de l’entête du site est une icône. C’est la première que j’aie regardée, gamin, à plat ventre sur le tapis de la pièce de séjour de l’appartement familial. Première planche de ce vieil atlas :

ATLAS POPULAIRE
Sur toutes les parties de la terre à l’usage des écoles et des familles
Dressé et publié par Guillaume Issleib
Complet en 28 cartes typographiques et coloriées
Gera. Issleib & Rietzschel. 1876

Elle représente les continents du monde tel que vus à l’époque, avec quelques originalités : centrée sur l’Océan Pacifique, dénommé, d’abord, Grand Océan. Seconde curiosité, la longitude zéro est sur Paris, France. Dans l’histoire de la cartographie on a passablement baladé le méridien 0 au gré de l’évolution de la géodésie, de la métrologie, de la cartographie, et aussi, de la politique mondiale. Plusieurs méridiens furent utilisés simultanément. C’est au milieu du XIXe siècle que la France fixe son méridien, et c’est en 1884, au terme de tractations compliquées, que l’on accorde à l’Angleterre la référence dorénavant universelle, passant par l’Observatoire de Greenwich. En contrepartie, l’Angleterre s’engageait à adopter le système métrique. Un bon siècle plus tard, ce n’est pas encore complètement le cas. Après le « Brexit », le méridien 0 pourrait-il revenir à Paris ?…

Les cartes bougent, évoluent, gardons-les à l’œil. D’autant que nous n’avons plus le regretté Jean-Christophe Victor pour attirer notre attention sur « Le dessous des cartes ». Qui sait ce que seront les cartes de demain et leur toponymie, avec les velléités d’indépendances et les conflits en cours tous azimuts.

Dans « La légende des montagnes qui naviguent », merveilleux récit de périples à travers les Alpes et les Apennins, Paolo Rumiz dit quelque part :

« (…) Dans mon enfance, lors des vagabondages toponymiques qui me laissaient à bout de souffle devant mon atlas, j’en vins à la conclusion que si ces noms fabuleux avaient disparu de la carte, les lieux proprement dits avaient dû disparaître aussi. Cette intuition était correcte : un lieu privé de nom cesse d’exister. C’est pour cela que je suis encore attaché aux cartes : elles servent à empêcher l’anéantissement de la mémoire. Le GPS ne suffit pas. Les lieux, il faut aller les chercher, les courtiser, les rejoindre en commettant des erreurs et des digressions, sinon ils sortent de votre mémoire. Un peuple qui n’a pas le sens de la géographie est destiné à sortir aussi de l’histoire. (…) »

Bonne nouvelle année, à travers la géographie !

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