Thursday thunder : brexit diary #13


Aujourd’hui Zaza s’est fendu d’un courrier soit disant pour rassurer les citoyens européens ici. Je vous passe sur la condescendance puante de sa prose, qui nous prend pour des cretins finis qui ne comprennent rien au discours de la grande leader. Rien que ça m’aurait déjà énervé, mais il y a mieux. Puisque Zaza nous écrit, je me suis dit que ça serait poli de lui répondre.  

Thursday thunder : brexit diary #13
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Dear Zaza,

Merci pour ta petite lettre, ça m’a fait très plaisir de recevoir un courrier comme ça, qui me prend ouvertement pour une imbecile finie et crédule, à rabâcher des platitudes rassurantes et sans engagement au milieu d’un monceau de mensonges par omission plus qu’inquiétants. C’est bien simple, je suis tellement éblouie par ta prose que je prends exemple sur toi en faisant  semblant de t’écrire alors que je m’adresse en fait à mes lecteurs (que j’aime beaucoup, eux). Tout comme tu as fait semblant de nous parler directement avec ta fichue lettre. Alors que c’est juste une opération de communication mal ficelée comme tu en as le secret, pour tenter d’amadouer les dirigeants européens qui te reprochent la façon dont tu nous traites et que tu vas rencontrer aujourd’hui. Ah ben ça alors, quelle coïncidence! Je comprends bien que vu le niveau de génie de tes ministres, tu aies pris l’habitude de prendre les gens pour des cons, mais c’est un peu gros quand même là. Je sais aussi que tu hais personnellement la libre circulation, mais je t’assure que tu ne peux pas arrêter les infos à la frontières, à coup de lieux communs enrobés de guimauve hypocrite. Bruxelles sait exactement comment tu nous traites en réalité. À force de t’adresser à un public de xénophobes lobotomisés, tu as aussi oublié que tous tes interlocuteurs ne vont pas gober sans réfléchir tes assurances vides de sens. C’est ballot. 

Alors donc, chère Zaza, tu tiens à me rassurer personnellement: tu aimes les sales migrants européens. Tu nous adores. Tu nous vénères. On est potes. Tu veux nous serrer dans tes bras de poulet acariâtre dans un grand élan d’amour bisounoursesque. On oublie tout, on s’aime, quand tu nous traitais de monnaie d’échange, c’était bien sûr pour dire que tu ne nous considérais pas du tout comme une monnaie d’échange. C’est évident, on a bêtement mal compris. Tu voulais juste nous transmettre tout ton amour. Pareil pour les lettres de déportation reçues par certains d’entre nous, c’était des preuves de ton immense affection. D’ailleurs, qu’on se rassure, tu ne veux absolument pas nous déporter ni séparer les familles. Enfin, tu souhaites pouvoir nous dire que tu ne deporteras peronne. Sauf que tu ne dis « je ne deporterai personne » . Pas plus que tu n’inscris dans la loi le maintien de nos droits, alors que rien ne t’en empêche. Bien sûr, tu ne vas pas nous déporter maintenant, tu n’en as pas le droit, pas avant mars 2019. Mais après? Après, tu sais comment tu vas séparer les bons migrants qui auront le droit de rester et les mauvais migrants qui dégageront, mais tu refuses de nous dire quels seront les critères. D’après ce que tu nous as proposé avec ton « settle status », les européens qui ne sont pas salariés depuis au moins 5 ans ont des soucis à se faire, malgré ta lettre. Les parents au foyer, même avec un conjoint britannique, les retraités, les artisans, les couples mixtes européens/ non européens…ça fait du monde. Beaucoup de monde. Des gens qui sont ici légalement je le rappelle, et que tu veux rendre illégaux a postériori. Et ceux qui pourront rester, ils seront fichés, perdront une partie de leurs droits (en matière d’accès aux soins ou de regroupement familial entre autres), seront administrativement stigmatisés en devant porter sur eux en permance une carte spéciale, juste pour les européens et seront considérés a priori comme des criminels par l’état,  à eux de prouver qu’ils ne le sont pas. C’est sûr, c’est rassurant tout ça ma chère Zaza. Je me demande vraiment pourquoi on s’inquiète et on est furieux après ta petite lettre condescendante aimable.  On n’est jamais content aussi, nous les sales migrants européens. Tu prends sur toi de nous enfumer avec ta prose vide de sens, et ça ne marche pas. Alors que tes brexiters lyophilisés gobent tout, eux. C’est à se demander si on veut vraiment s’intégrer, tiens. Alllez, je vais finir en anglais, pour te faire plaisir. 

Sincerely (hating you)

Pomdepin