Voir Naples et mourir

Au début du mois d’avril dernier, après une nuit passée à Caserta Vecchia, nous rejoignons la bouillonnante Naples. Naples, ville fascinante, qui ne se laisse pas appréhender facilement et qui bouleverse nos sens. Amateurs de calme s’abstenir. Pour « sentir » Naples, il faut s’ouvrir et être prêt à recevoir tout ce qu’elle nous donne. A vivre un choc sensoriel et culturel. Des discussions animées, des saveurs simples et intenses, le chaos de la circulation, des habitants accueillants. Naples c’est tout ça et bien plus. Je vous propose un petit tour d’horizon de notre séjour de quatre nuits dans cette ville mystérieuse et multiple…

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Le centre antique

Le centre antique est organisé autour des trois decumani (les axes principaux de l’ancienne ville gréco-romaine, Néapolis) : le decumanus supérieur (l’actuelle via Anticaglia),  le decumanus majeur (l’actuelle via dei Tribunali) et le decumanus inférieur (Spaccanapoli).

Spaccanapoli – littéralement « Fend-Naples », du fait que la rue divise Naples en deux – désignait à l’époque romaine le decumanus inférieur (les actuelles via Benedetto Croce et via San Biagio dei Librai). Cette rue est l’une de mes préférées du centre car bien que très animée, elle est piétonne et renferme de nombreux palais, églises et édifices publics.

Vue sur Spaccanapoli depuis le château Sant'ElmoVue sur Spaccanapoli depuis le château Sant’Elmo

Sur la piazza del Gesù Nuovo se trouve une église du même nom, érigée à la fin du XVIe siècle par les Jésuites. Cette église monumentale possède une étonnante façade en pointes de diamant, héritage du palais des Sanseverino dont elle prend la place. Au centre de la piazza se dresse la flèche de l’Immacolata, avec à son sommet la statue en bronze de la Vierge Immaculée.

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De la piazza Dante, on gagne le decumanus majeur (la via dei Tribunali) en passant par la via Port’Alba. Atmosphère d’un autre temps dans cette petite rue où les librairies anciennes se succèdent.

Via Port'AlbaVia Port’Alba

La via dei Tribunali bouillonne de vie et offre un visage plus populaire que Spaccanapoli. A toute heure de la journée (sauf peut-être durant le moment de la sieste), on voit défiler les voitures et les vespas dans cette rue étroite, on assiste aux vives discussions des Napolitains sur la chaussée ou d’un balcon à l’autre. Un antiquaire, musique à plein volume, fait le show en dansant et chantant dans la rue devant sa boutique. Un serveur, plateau à la main, se fraie un chemin entre les passants pour livrer le café aux commerçants proches. Les marchands envahissent la chaussée de leurs produits, trop à l’étroit dans leur échoppe. Une vraie scène de théâtre.

via-dei-tribunali (1)La via dei Tribunali via-dei-tribunali (2)Pulcinella via-dei-tribunali (3)Un antiquaire en représentation devant son échoppe

Sur la petite place Riario Sforza, on peut admirer la guglia (flèche) di San Gennaro, l’obélisque le plus ancien de la ville, réalisé en l’honneur du saint pour le remercier d’avoir sauvé Naples de l’éruption du Vésuve en 1631. Ces flèches baroques parsèment toute la ville.

La flèche consacrée à San GennaroLa flèche consacrée à San Gennaro

Où manger une bonne pizza dans la via dei Tribunali ? La via dei Tribunali regorge de bonnes adresses qui proposent des pizzas napolitaines à la hauteur de leur réputation. Pour notre part, nous sommes allés à la pizzeria Dal presidente, à l’angle de la via Duomo. Pizzas moelleuses à souhait.

La La « Buffala » de la pizzeria « Dal Presidente »

Le centre monumental

Le centre monumental englobe de nombreux édifices dignes d’intérêt : le Castel Nuovo, la piazza del Municipio, le Palazzo Reale, la Piazza del Pebliscito, la galerie Umberto Ier ou encore la via Toledo.

Le Castel Nuovo, appelé aussi il Maschio Angioino (le « bastion angevin ») par les Napolitains, a été construit au XIIIe siècle par Charles Ier d’Anjou pour ensuite être profondément remanié par les Aragonais.

Le Castel NuovoLe Castel Nuovo

Mais le Castel Nuovo plaisant peu aux Espagnols, ils décidèrent de construire le Palazzo Reale à partir de 1600, bien plus moderne, vaste et somptueux que la forteresse. Le palais débouche sur la piazza del Pebliscito, une place monumentale au pied de la colline de Pizzofalcone, qui accueillait autrefois les cérémonies officielles et les parades militaires.

La piazza del PebliscitoLa piazza del Pebliscito

Juste à côté de la place se trouve le célèbre et chic Gran Caffè Gambrinus, fondé en 1860. Décoré dans un style Liberty, il a conservé ses décors de stuc, de soie et de papier et ses grands miroirs. Je vous conseille d’y goûter le caffè alla nocciola (café à la noisette), une recette de Campanie. Les consommations servies à table sont bien plus chères que dans les autres établissements mais au comptoir elles restent largement abordables.

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De la piazza Pebliscito part la via Toledo, une longue artère commerçante extrêmement animée, piétonne de la piazza Trieste e Trento jusqu’à la piazza Carità. Elle fut perçée par le vice-roi espagnol Don Pedro de Tolède en 1536 afin d’étendre Naples vers l’Ouest en raison de la forte croissance démographique de la ville.

En bas de la via Toledo, la Galleria Umberto Ier symbolise la Belle Époque napolitaine. Construite en 1887 pour imiter la galerie Victor-Emmanuel II de Milan, elle est composée d’une coupole de fer et de verre. Elle abrite des magasins chics et des cafés.

Voir Naples et mourir La Galleria Umberto Ier

A l’Ouest de la via Toledo, les quartiers espagnols se caractérisent par un quadrillage très serré de rues et d’escaliers montant vers les hauteurs de San Martino. Construits également par Don Pedro de Tolède pour accueillir les troupes espagnoles, ces quartiers sont aujourd’hui habités par les familles les plus pauvres qui vivent pour la plupart dans des bassi, des logements d’une seule pièce, étroits et sombres, dans lesquels toute la famille s’entasse. Le chômage et la criminalité atteignent des niveaux très élevés dans ces quartiers, mais ils n’en restent pas moins un lieu de passage obligé pour découvrir une Naples populaire. Ici, le linge sèche accroché entre deux immeubles, les scooters pétaradent, la vie quotidienne des familles déborde dans la rue faute de place dans leur habitation exiguë.

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Le lungomare

La promenade le long du lungomare de Naples a été un des moments les plus délicieux de notre séjour. Départ du quartier de Santa Lucia. Visite du Castel dell’Ovo (entrée gratuite) et de Borgo Marinaro, petit port de plaisance pittoresque qui accueille plusieurs restaurants très chic.

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La promenade continue le long de la via Partenope, passeggiata très prisée des Napolitains et bordée par des hôtels de luxe, des restaurants et des bars. Pour nous qui aimons marcher, nous avons poursuivi la balade jusqu’à Mergellina, un port de plaisance mignon comme tout qui offre également une petite plage. En ce dimanche, les Napolitains sont nombreux à profiter de la douceur de vivre de ce quartier et de la petite plage située sur le largo Sermoneta. Avec en prime une merveilleuse vue sur le Vésuve.

lungomare-naples (1)Vue depuis Mergellina lungomare-naples (2)Mergellina

La colline du Vomero

Sur les hauteurs de Naples se trouve le quartier résidentiel du Vomero. Je vous conseille de vous y rendre en funiculaire puis de redescendre vers le centre en empruntant la via Pedamentina San Martino, qui part de la place se trouvant devant la chartreuse di San Martino. Magnifiques vues sur la ville et le golfe de Naples.

La via Pedamentina San MartinoLa via Pedamentina San Martino

Emplacement stratégique, le Vomero abrite la château Sant’Elmo, immense forteresse bâtie au XIVe siècle puis reconstruite deux siècles plus tard. Sa visite vaut le détour pour la vue grandiose qu’elle offre sur tout Naples, sans doute la plus belle vue sur Naples et la baie. A côté du château se dresse la chartreuse di San Martino, édifice construit en 1325 pour l’ordre des Chartreux.

Vue depuis le château Sant'ElmoVue depuis le château Sant’Elmo castel-sant-elmo (2)Vue depuis le château Sant’Elmo – chartreuse de San Martino au premier plan

Cœur du Vomero, la partie qui entoure la piazza Vanvitelli est très commerçante et animée, notamment en soirée. C’est une autre Naples qui s’offre à nous, plus calme et chic. On peut y admirer de belles villas, comme la villa Floridiana qui se situe dans le parc du même nom.

La via Luca Giordano, rue piétonne commerçanteLa via Luca Giordano, rue piétonne commerçante

Le quartier de la Sanità

La Sanità est un quartier populaire de Naples qu’on rejoint en passant la porta San Gennaro, au nord du centre historique. C’est un quartier préservé – nous n’y avons d’ailleurs rencontré aucun touriste – vivant, bruyant, dans lequel on peut observer de magnifiques palais et églises qui côtoient des édifices délabrés. Extrêmement animée, la Sanità constitue le lieu idéal pour observer la vie quotidienne des Napolitains. Ici, les drapeaux tricolores fleurissent. Un marché débordant de vie se tient tous les jours dans la via dei Vergini. La Sanità, c’est aussi le quartier où est né le célèbre acteur napolitain Totò.

sanita (2)Le quartier de la Sanità

Dans la via dei Vergini, en face de l’église des Pères Missionnaires, se trouve un étonnant palais, le Palazzo dello Spagnolo. Construit en 1738, cet édifice est généralement attribué au célèbre architecte du XVIIIe siècle, Ferdinando Sanfelice, et se compose d’un majestueux escalier double en « ailes de faucon ».

Un peu plus loin sur la piazza della Sanità se dresse la Basilica Santa Maria della Sanità, une imposante église baroque érigée sur d’anciennes catacombes, les catacombes de San Gaudioso, qui peuvent se visiter. La beauté de la basilique contraste avec les immeubles décrépis qui l’entourent. Comme un peu partout à Naples, la beauté côtoie quotidiennement le délabrement et la misère.

Le Palazzo dello SpagnoloLe Palazzo dello Spagnolo La Basilica Santa Maria della SanitàLa Basilica Santa Maria della Sanità