Au cœur de la vieille ville d'Albi, à deux pas de la cathédrale Sainte-Cécile, s'est ouvert en 2012 le musée de la Mode. Structure privée (c'est-à-dire qu'elle ne reçoit aucune aide de l'État), le musée permet d'exposer chaque année une centaine de pièces parmi les milliers que comprend la collection de son propriétaire, Dominique Miraille. Costumes anciens (les plus vieilles pièces remontent au XVIIIe siècle), accessoires, dentelles, magazines... sont ainsi présentés pêle-mêle d'avril à décembre, sans autre lien que celui de la thématique annuelle.
"Noir sur blanc, noir et blanc" ; voici le thème choisi pour cette quatrième exposition. L'idée est de faire coïncider un texte (vingt-six, un auteur pour chacune des lettres de l'alphabet) avec le vêtement ou l'accessoire décrit. Une (re)lecture ingénieuse des classiques associée à une découverte d'écrivains moins connus qui permet de remettre astucieusement en contexte chacune des pièces exposées. Si la majorité sont effectivement en noir et blanc, ce n'est pas une règle absolue : on pourra ainsi s'étonner devant une cravate verte coïncidant avec le poème d'Apollinaire ou une somptueuse robe marron pour illustrer Maupassant.
Si vous pensez que ce musée est semblable à n'importe quel autre, détrompez-vous ! Fruit d'une trentaine d'années de collection, on ressent à chaque instant qu'il est l'œuvre d'un passionné. Et d'un passionné méticuleux. Scénographie soignée, lumière tamisée, mannequins réalisés sur mesure... Tout est pensé dans les moindres détails, à la fois pour préserver les vêtements mais également pour le confort du visiteur. Par exemple, ne soyez pas étonnés si en période de forte affluence le musée ferme ses portes durant les heures d'ouverture : c'est pour mieux réguler le flux de visiteurs. Et si vous avez la chance de participer à une visite accompagnée ou vous faire conter l'histoire du lieu par son propriétaire, qui n'est jamais bien loin, surtout n'hésitez pas : Dominique Miraille sait communiquer sa passion et vous livrera une foule de petites anecdotes sur les pièces amoureusement réunies.
Enfin, c'est la diversité de sa collection qui est l'un des gros points forts du musée. Contrairement à d'autres, où c'est parfois le renom du créateur ou l'importance historique de la pièce qui prime, Dominique Miraille a rassemblé autour de lui des vêtements et accessoires d'horizons divers. Point de débauche de grands créateurs par exemple, mais des habits parfois plus modestes, mais qui n'en restent pas moins rares, comme ce costume que les femmes portaient pour faire du vélo, présenté ci-dessus à droite. Un témoignage de l'émancipation féminine dont il ne reste de nos jours que très peu d'exemplaires en bon état. Au-delà de la passion, c'est une mémoire formidable sur l'histoire du vêtement qui s'étale sous nos yeux.
Pour terminer, quelques mots sur le lieu, qui mérite lui aussi qu'on s'y attarde. Le musée a en effet ouvert dans un ancien couvent des Annonciades, bâti au XIIe siècle et plusieurs fois remanié depuis. Il s'étend sur deux étages et cinq pièces. Plafond polychrome, cave voûtée ou encore portes gothiques attendent ainsi le visiteur, qui se retrouve projeté dans le temps, dans un espace à la fois résolument moderne mais chargé d'histoire. Et avant de partir, ne manquez pas la boutique du musée, juste à côté. Bijoux, coussins, cartes postales et même des vêtements d'époque : ce sera difficile de repartir les mains vides.
Un musée à conseiller aux amateurs de mode et de beaux ouvrages mais pas uniquement. Par son approche passionnée et non conventionnelle, le musée de la Mode d'Albi cherche à toucher un large public et permet de se réapproprier l'histoire du vêtement, tout en allant de découverte en découverte. Par ailleurs, du fait de l'importance de la collection, et de la fragilité des pièces, chacune ne sera ainsi exposée qu'une seule fois. Un bon prétexte pour revenir chaque année !
Musée de la Mode17 rue de la Souque 81000 AlbiExposition "Noir sur blanc, noir et blanc" jusqu'au 27 décembre.