Toddler 5 grandit. Il commence à se lasser de sa poussette et il est hyperactif et infatigable fait preuve d’une certaine vitalité. Je le laisse donc de plus en plus marcher pour aller chercher ses sœurs à l’école. C’est vrai, maintenant qu’on habite à 5 minutes, pourquoi s’en priver? Ça nous permet d’ailleurs inexpliquablement de mettre une demi-heure pour faire le trajet. Ça l’occupe à défaut de le fatiguer (moi par contre…)
On commence par la chasse aux Shouuuuuz. Si. Je rappelle que Toddler 5 est apprenti bilingue. Bref, il cherche ses chaussures, ses shoes. Parce qu’il tient absolument à les ranger lui même le matin en rentrant de l’école. Sous l’évier. Dans la panière à linge, sur l’oreiller de L’Ado, dans la gamelle des chattes…enfin bref, pas dans le placard à chaussures, ce serait trop simple. Après on attaque la danse du manteau. Parce que Toddler 5 est un grand certes, mais il a besoin d’aide. Il se met à tournoyer sur lui même comme un derviche tourneur sous acide pendant que j’essaie d’attraper un bras au vol et en pure perte pour lui enfiler au moins une manche, tant pis si il a la capuche sur les fesses. Je suis persuadée d’avoir entendu la chatte en rire. Cette bête se fiche de moi, c’est evident. Je n’ose même pas imaginer dans quelques semaines quand il faudra mettre écharpes, gants et bonnets, on s’y prendra deux heures à l’avance, pour être dans les temps. Après ce saucissonage approximatif dans son manteau, Toddler 5 est ravi et je suis déjà épuisée, échevelée, et en transe alors qu’on a toujours pas quitter la maison.
Toddler 5 est très serviable, il entreprend ensuite de m’aider, il va chercher mes chaussures (bêtement dans le placard), enfin généralement une sandale rouge et une bottine noire. Je ne vois pas pourquoi cet enfant insiste pour que j’adopte le même look que L’Ado. Enfin bref. Comme je ne vais pas assez vite, il m’encourage, si c’est pas mignon. Quick mamaaaaan, Quiviteuh!
On peut y aller. Ah non, hurlement strident sur le pas de la porte, le voisin, qui a repéré nos horaires et était sorti pour nous harceler dire bonjour manque de faire une attaque. On a oublié le cartable. Ben oui, Toddler 5 a bien remarqué que ses sœurs prennent leur cartable pour aller à l’école, donc lui aussi, même si c’est juste pour aller les chercher. On ne lui fait pas. Si ça se trouve , sans le cartable, on arrive pas jusqu’à l’école. Restons prudents. Le voisin est carrément affalé dans les mûriers, pour ne pas nous louper quand on ressort.
-ah, ben, il est en forme aujourd’hui!
-oui…comme tous les jours…
-au moins, il sait ce qu’il veut, Ahaha. J’ai vu vos grands partir ce matin, ils ne mettent pas encore d’écharpe? Ah, ben vous non plus…Sinon, vous n’êtes pas encore venus voir nos photos d’Égypte?
-il faut que j’y aille, je pars chercher les filles à l’école.
-Le plus simple c’est que je passe prendre un café et je vous les montrerai. Il rentre bien comme d’habitude ce soir Marichéri? Je sais qu’il veut les voir. ( en vrai, il l’appelle par son prénom, anglicisé. Il a décidé qu’ils étaient potes. Best friends for ever et tout ça. Ce n’est pas réciproque…mince, j’aurais dû mettre « DarlingHusband »)
-je lui en parlerai, je dois y aller.
-j’ai remarqué , hier il est rentré plus tard. Je me demandais… Alors, j’ai regardé sur internet, ils disaient que les trains avaient un problème.
-c’est ça, bon, à bientôt!
-bon alors je passe quand ? Pour les photos?
-je vais être en retard, au revoir!
On part enfin, Toddler 5 a son cartable. Il accepte de donner la main en sortant de l’allée. On a pas fait trois mètres qu’il veut revenir en arrière, pour admirer un tracteur. Mamaaaaan, tractor, tractoooor! Oui, mon chéri j’ai vu, il faut y aller. Todlder 5 refuse de bouger, les pieds fermement ancrés dans la boue du talus jusqu’aux coudes. Tractoooooor! Mais qu’est-ce qu’ il fiche encore, ce fermier! C’est pas possible, il est toujours là à l’heure de l’école, pour faire son malin, il a pas un autre champs pour aller y promener son tracteur? En plus, on est encore près de la maison, le voisin va rappliquer…bon, Toddler 5 tu fais bye bye au tracteur et on va à l’école. Heureusement, il y a une flaque de boue qui fait diversion un peu plus loin, Todlder 5 pique un sprint pour sauter dedans à pied joints. Puis il insiste pour marcher dans les feuilles mortes qui se collent sur ses shouuuuz et son pantalon trempé, il est ravi. On dirait qu’il a écrasé un troupeau de poules rances, mais c’est pas grave.
Source
Il s’extasie ensuite parce qu’il a vu passer un « vion » dans le ciel. Non, mon chéri, c’est un oiseau. « Bird vion? » Ok, si tu veux. On continue le nez en l’air pour trouver d’autres vions, et pour louper le trottoir et s’etaler. Je parle de moi bien sûr, puisque Toddler5 lui, a bien vu le trottoir et l’oiseau qui s’est posé dans un buisson. Qu’il tente d’escalader aussitôt, mais il prend peur devant une sorte de fourmi. On progresse trois minutes sans incident, poursuivi par la fourmi, ce qui permet à Toddler 5 de commenter le parcours:
-un tree, une tuture, une tuture, un tree, un tree…
C’est fascinant. Mais on avance bien. Soudain, la distraction absolue, Toddler 5 a vu un bus débouler au coin de la rue (mamaaaaaaaan, busssssss, bussssss!), on s’arrête donc pour l’admirer et lui faire coucou énergiquement. Pour peu que le chauffeur soit sympa, il fait aussi coucou et klaxonne, Toddler 5 est en transe. Pour fêter ça, il part en courant et dans la direction opposée, avec moi soufflant derrière comme un hippopotame asthmatique. Non, on va à l’école, c’est par là. Après huit tours autour d’un tree, pardon d’un arbre, je le rattrape, bon ça suffit, on va finir par être en retard. Il est toujours hilare, j’ai l’air d’une théière en ébullition, la choucroute toute ébouriffée, et le manteau plus débraillé que celui de Toddler 5. Juste quand on commence à croiser d’autres mamans allant à école. Dont une avec un chien…Alors là tout dépend. Si Todlder 5 lui trouve une bonne tête, il le pursuit sauvagement : »play avec me, chien-dog » . Si au contraire, il décide d’être terrorisé, il se lance dans l’ascension de sa mère à mains nues par le mollet droit en poussant des cris de dément. Il n’y a aucune logique à sa réaction, le même chien peut le terrifier aujourd’hui et lui paraître éminemment sympa demain. Si il a peur, il se cramponne à moi, façon velcro en finissant de défaire mon manteau pour attaquer mon pull, histoire que j’arrive à moitié déshabillée à l’école. Si il veut jouer avec le chien, je dois lui courir après au milieu des aboiements. Des siens, je veux dire, puisqu’il essaie de communiquer avec le chien. Le résultat est le même au niveau vestimentaire, en tout cas pour moi.
Heureusement on arrive enfin au Green, l’espace vert devant l’école. Avec son aire de jeux. Toddler 5 non, le tobbogan est tout mouillé! Et on va être en retard pour tes soeurs. Pour montrer sa désapprobation et le fait qu’il refuse d’avancer plus loin, il s’assoit directement dans une flaque, si tu veux que je bouge, tu vas devoir venir me chercher. J’y plonge donc aussi, je récupère un gamin trempé, couvert de boue, et hurlant de rage. Ça suffit, si tu continues, je te remets dans la poussette! Ce qui est bien avec un enfant aussi jeune, c’est qu’il n’a pas encore un sens de la logique tres développé. Le fait que la poussette soit restée à la maison n’atténue en rien la menace, il repart en me donnant gentiment la main…Pour monter sa bonne volonté, il décide de cueillir un pissenlit, là au milieu de la flaque, et de me l’offrir. On a mis une demi-heure, mais ça y est, on est arrivé à l’école et il rejoint les enfants de son âge pour jouer dans la cours en attendant que les grands sortent.
Ce qui fait plaisir à voir, ce n’est pas que Toddler 5 s’entende aussi bien avec ses futurs camarades d’école, c’est que leurs mamans sont à peu près dans le même état que moi. Du coup, on se salue poliment et on essaie de passer inaperçu, au milieu des parents d’enfants plus grands. Qui n’ont pas la jambe gauche couverte de boue jusqu’aux oreilles, ni de pissenlit dressé tout droit dans les cheveux ou leur manteau qui pendouille lamentablement, lesté par un tas de feuilles mortes. Ils ont présentables. Eux.