Comment faire un tour du monde avec 10 tonnes de bagages

Sur le thème: « conseils aux futurs voyageurs », je dois bien reconnaître que ce blog n’a pas été très présent. Il ne propose que des récits de voyage personnels, écrits sur le vif… Rien pour aider concrètement ceux qui préparent un voyage. Et puis, ce matin, une illumination m’a saisie: moi aussi, je vais aider mon prochain, je vais lui expliquer comment NE SURTOUT PAS faire comme moi! Que du vécu et du concret! Après 8 mois de tour du monde, mes erreurs en termes de bagages deviennent criantes, pour ne pas dire pesantes.

la préparation des bagages

Avant de vous raconter tous les trucs super inutiles que j’ai eu la bonne idée de mettre dans ma valise pour un an, je dois commencer par vous parler du contexte de notre départ. Ce n’est pas que je cherche des excuses mais il faut bien dire que j’ai pris à la légère ces histoires de bagages.

Habitués des déménagements et pas vraiment matérialistes, Benoit et moi avons quitté le Panama (notre dernier chez nous) avec peu d’affaires : surtout des vêtements et des livres. Vu nos valises à l’arrivée en France, j’étais très optimiste sur le fait de partir léger pour ce tour du monde. Sans compter que, quand on part 3 semaines en voyage, on ne prend qu’un petit bagage cabine, jamais rien en soute! J’avais donc TOUT de la nana super efficace pour partir léger pendant un an! Oui, mais non! Ce n’est pas si simple! 

Ce qui aurait dû me rendre plus humble, c’est notre manque de préparation en général. On a décidé de ce tour du monde peu de temps avant le départ. On s’estimait assez prêts quand on a préparé l’itinéraire et acheté les billets d’avion. On n’a pas vraiment réfléchi à nos bagages. Imaginez qu’on est partis sans se préoccuper des visas et des vaccins (on s’en est occupés au fur et à mesure!). Je me rappelle avoir lu un blog où un couple s’était préparé pendant plus d’un an et je me suis dit : « hou la la, des malades de l’organisation! ». Mea culpa! Amis voyageurs, si vous avez préparé votre tour du monde un an à l’avance, vous avez le droit de vous moquer de ce qui va suivre, sans restrictions!

fatras de chaussures

Nous, on s’est retrouvés, deux jours avant le grand départ, à se dire « eh, il faudrait faire les bagages! » en regardant  la chambre d’amis de mes parents que l’on avait transformé depuis quelques jours en local du secours populaire.  Et premier constat : malgré nos différentes valises, aucun format ne convenait pour ce long voyage! On court chez un bagagiste acheter une valise solide qui coûte la peau des fesses! On se dit aussi que 2 petits sacs à dos seraient bien pratiques pour ranger les trucs qui ne peuvent pas nous quitter. Oui, j’avoue : on n’avait pas de sac à dos! Les nôtres avaient bien moisi dans une cave.

De retour à la maison, on remplit nos valises. Je sais que ce sujet prend des semaines chez certains voyageurs mais pour nous ça a été très rapide. Benoit a bouclé le tout comme d’habitude en un temps record, comme s’il partait une semaine. Comme notre itinéraire était censé éviter le froid (parce qu’on n’aime pas et parce qu’on n’a pratiquement pas de vêtements adaptés), je me suis bien moquée de lui avec sa polaire, son pull en laine et son anorak; mais c’est LA panoplie qui le suit dans tous ses voyages même dans les climats tropicaux « au cas où ». Il a tenu aussi absolument à prendre des chemises. Petit moment de tension :

Moi: -« tu vas mettre des chemises froissées! »

Lui: -« non, des chemises repassées! »

Moi: – « et comment tu vas les repasser? »

Lui: – « je paierai quelqu’un! »

Ah voilà! Avec les hommes, tout est facile. Je m’incline tout en calculant mentalement le budget repassage qui vient d’apparaître!

Le chapitre des chemises étant clos, je dois me concentrer sur MA valise. Et là, pour la première fois, je réalise un truc : ce que je vais oublier sera oublié pendant un an. J’ai l’habitude de toujours oublier des trucs quand je pars pour 2-3 semaines, mais ce n’est pas si grave. J’oublie de prendre des chaussures dignes de ce nom et mes petites jupes restent dans la valise parce qu’avec des baskets ou des tongs, ça le fait pas! Ou alors, il fait plus froid que prévu et je me retrouve avec un pull de Benoit 3 fois trop grand pendant tout le voyage. Ou beaucoup plus grave, j’oublie ma trousse à manucure!!! etc… Cette fois, je me dis que je dois être plus attentive. On ne pourra pas racheter tout ce que je vais oublier. Et je ne me pose PAS la question que tout le monde se pose : « comment prendre le moins de choses possibles? » Non, moi j’innove : « Comment prendre le maximum pour être tranquille? » Et, je peux vous le dire maintenant:  ça, c’est UNE GROSSE ERREUR!

valises de chapeaux

Le Résultat

Le matin du départ, on pesait nos bagages sur le pèse-personne de la salle de bains. Le résultat : une valise à roulettes de 23 kgs chacun (au prix de renoncements déchirants pour moi) et deux petits sacs à dos bien lourds. Un des sacs à dos contient les documents importants et tout le « matériel » : un laptop poids lourd ( mais on ne voulait pas en acheter un autre), une tablette, 2 téléphones portables bas de gamme et pleins de câbles, adaptateurs et multiprises.

Un autre sac à dos contient nos guides de voyage. Benoit tenait beaucoup à la version papier. Moi : -« très bien, mon chéri, tu vas porter tes 10 kgs de guides! » On les donne en quittant chacun des pays au fur et à mesure!

Quand on est deux, forcément, on n’a pas la même idée de ce qui est important ou pas! On a pourtant fait le constat, chacun de notre côté, que bien que nos valises soient très différentes, elles ont en commun d’être remplies de trucs dont on ne s’est pas servis.

Le moment est venu de vous faire la liste de toutes les choses inutiles que j’ai prises. Aïe! Je sacrifie ma fierté pour être utile à mon prochain!

Mon top des trucs inutiles :

  • Le maquillage, les crèmes et le parfum. J’ai beaucoup hésité et je me suis dit qu’à 40 ans passés, si j’arrête le maquillage, mon amoureux va prendre la fuite. Ce n’est pas que je me maquille à la truelle mais puis-je me passer d’un maquillage léger qui camoufle un peu et met en valeur ce qu’il peut? Non! Alors j’ai pris un peu de tout! Résultat : avec notre rythme de fou, je ne me suis presque jamais maquillée, mon homme ne voit même pas la différence et moi, je contemple régulièrement mes petits étuis de maquillage qui doivent peser quelques centaines de grammes. Je me mets de la crème une fois par mois quand ma peau me rappelle celle d’un croco et mon parfum s’est évaporé depuis belle lurette! Je croyais que sans mon Shalimar (le parfum de notre rencontre), je me sentirais incomplète et que mon homme ne me reconnaîtrait plus! Délire de nana!
  • Un assortiment de jupes et de robes. J’ai choisi celles qui ne se froissent pas trop. La plupart assez décontractées et quelques unes en cas de soirée plus habillée.  J’avais juste oublié un détail: notre itinéraire ne se prêtait pas trop à ces petites tenues : Dans le désert d’Atacama, je me suis habillée avec tout ce qu’on voulait bien me prêter pour ne pas mourir de froid. Ressembler à un Inuit ne me gênait pas du tout. Le road trip au Mexique ne m’a pas donné d’occasions de faire ma belle (trop épuisée, donc soirées dodo!). Aux USA, il ne faisait pas vraiment chaud (sauf à Miami) et ensuite en Asie, j’ai adopté les tenues couvertes de rigueur. J’ai dû en acheter plusieurs au Vietnam et en Inde car je n’avais rien de léger et couvrant par 40°c! Et hop, un kilo en plus dans la valise!
  • Ma paire de chaussures à talons. Avec les robes, il m’en fallait au moins une paire. Après une réflexion digne d’un Prix Nobel de Maths, j’ai choisi celles qui seraient les plus faciles à porter en toutes circonstances. Lorsque je les ai glissées dans la valise, je disais en plaisantant: « en cas d’invitation chez l’ambassadeur » (une blague avec ma copine Fabienne). Résultat: Je les ai mises deux ou trois fois à tout casser! Je ne me suis jamais retrouvée dans une soirée habillée! Aucune invitation à un cocktail! Je n’ai même pas croisé d’ambassadeur! Dépitée!jeune femme en tenue de soirée
  • Ma série de pantalons. J’ai pris toutes sortes de pantalons et en fait, la moitié aurait suffi. Quand je suis en pantalon, je préfère les supers légers achetés aux Vietnam qui se lavent et se sèchent facilement. Les jeans, c’est sympa mais c’est très lourd, dûr à laver à la main et à sécher! Juste 2-3 pantalons suffisent. Et franchement, au bout d’un moment, on n’est plus du tout gênée de mettre le même pantalon plusieurs jours de suite, même avec des tâches. Qui s’en préoccupe?  Il faut savoir que tout le monde s’en fout! Et on trouve toujours un moyen de laver ses vêtements. À quoi bon prévoir pour un mois complet comme je l’ai fait?
  • Ma réserve de savons, brosses à dent et dentifrices. Vous savez ce qu’on prend dans les chambres d’hôtels parce que c’est bien pratique et qu’on utilise jamais?! Avant notre départ du Panama, j’ai offert à des femmes de mon entourage plein de ces savons et crèmes. Elles étaient ravies et moi, j’ai gardé ce qui me semblait nécessaire, soit 25 de chaque! ;-) Inutile!  On a logé la plupart du temps dans des hôtels qui ont des savons et des crèmes. Après 8 mois de voyage, c’est seulement maintenant que nous restons un mois dans un studio que tout cela m’est utile et que tente de vider le stock. Je ne pense pas que l’économie réalisée valait la peine de se charger pendant tous ces mois.
  • Un épilateur électrique de 1 kilo qui n’a jamais fonctionné en dehors du Panama. Il n’a pas dû apprécier le courant électrique brésilien. Je l’ai gardé plusieurs mois en pensant qu’il pourrait ressusciter dans le pays suivant mais le miracle n’a pas eu lieu. J’ai jeté le cordon électrique/ transformateur (?) mais quand même gardé l’instrument de torture. Vraiment très utile! Je devrais le customiser pour en faire un pendentif!
  • Les téléphones. On ne s’en est jamais servis! Acheter une carte SIM dans chaque pays ne nous a jamais paru utile! On utilise plus Internet que le téléphone pour communiquer, et si besoin, il y a toujours quelqu’un pour nous dépanner.

Pourquoi avoir des bagages de 10 tonnes, c’est un problème?

On pourrait croire que, quand on part longtemps, avoir trop de bagages, c’est mieux que pas assez. C’était d’ailleurs ma brillante réflexion avant de partir! J’aurais dû lire « les 10 trucs pour préparer son tour du monde » AVANT le départ et pas après. Résultats des courses : après 8 mois intenses, je peux vous dire que partir avec des tonnes de bagages n’est vraiment pas une bonne idée. Pourquoi?

  1. Parce que ça fait mal au dos. Au fil des mois, mon organisme a envoyé des signaux de détresse. J’ai même dû aller à l’hôpital puis chez un ostéopathe à Kyoto car je ne pouvais plus respirer (à cause de la cage thoracique comprimée). Et j’avoue que même si j’avais juré-craché que j’assumerai seule ma valise, Benoit m’aide très souvent de peur que je ne me casse en deux! Quand mon féminisme rend les armes… Dites-moi, les backpackers, comment vous faites avec 15 kgs sur le dos? Je dois être trop fragile ou trop vieille! (pléonasme?) fourmi épuisée
  2. Parce que ça limite les déplacements. Rechercher un hôtel, chargés comme une mule, monter des étages par les escaliers, caser tous les bagages dans un bus de ville, c’est galère et au bout de quelques mois, ça lasse. On a atteint nos limites à notre arrivée à Rhodes quand on a dû traîner les valises sur les vieilles rues pavées en langue de chat! On finit alors par rechercher la facilité: un hôtel plus près ou prendre un taxi… Et on pense sérieusement à donner la moitié de nos affaires.
  3. Parce qu’à chaque enregistrement, tu risques d´être recalée. Les compagnies aériennes fixent la limite à 20 ou 23 kgs pour les bagages en soute. Nous, on est arrivés plusieurs fois avec 25-26 kgs, sans parler des sacs à dos, hors-limite. Notre tactique est de choisir le guichet d’une jeune femme que Benoit se chargera d’amadouer avec ses quelques phrases apprises dans la langue locale : une bonne petite « tchache » et la demoiselle oublie de regarder l’affichage de la pesée. Et si elle remarque quelque chose, on passe au plan B : expressions désolées des gentils voyageurs autour du monde qui sont quand même de très très bons clients et qui ne peuvent pas faire autrement. Nos techniques ont très bien fonctionné sauf avec American Airlines que nous détestons. Ces gens-là ne comprennent qu’une langue : celle de la carte bancaire!
  4. Parce qu’on a l’air ridicule. Comme on n’est plus de jeunes gens se déplaçant avec un gros sac à dos, personne n’imagine que l’on fait un tour du monde d’un an. Quand on arrive dans un hôtel pour quelques jours, on nous regarde avec étonnement voire moquerie: »Ils transportent des haltères, ceux-là? », « Ils ont découpé la belle-mère en morceaux ou quoi? » Ou « ils ne peuvent pas quitter la France quelques jours sans leur garde-robe complète? »
  5. Parce que ça prend trop de place dans la chambre d’hôtel. On choisit des hôtels plutôt sympas ou bien situés en général, mais pas toujours avec de grandes chambres. Au Japon, en particulier, on a dû déplacer et superposer plein de trucs pour poser nos valises. Aller jusqu’aux toilettes était un parcours d’obstacles.
  6. Parce qu’on finit par ne rien retrouver et que c’est le bazar. Retrouver le petit short blanc s’apparente à une descente en spéléologie et quand j’émerge, il ressemble plus à un vulgaire torchon de cuisine. Ou alors, je fais ma maligne du style  » attends mon chéri, bien-sûr que j’ai des pansements pour ta coupure, j’ai pensé à tout… » Et le pauvre a le temps de se vider de son sang avant que je retrouve le truc qui s’est planqué au milieu d’une de mes innombrables pochettes! Même mes vêtements infroissables ne ressemblent plus à rien.

Voilà, j’ai vidé mon sac, vous savez tout! Et maintenant j’ai besoin de vos témoignages. Ceux et celles qui sont pires que moi, je vous en prie, avouez! Je ne lis que des trucs de gens super organisés et j’ai besoin de me sentir moins seule avec mon « trop de bagages ». Ceux qui pensent « ah ben voilà, elle aurait dû lire mon « programme en 10 points pour tout faire bien », je vous en prie, ne criez pas victoire si vite! Il me reste quelques mois de voyage et je n’ai pas dit mon dernier mot : je vais me servir d’un truc inutile par jour, jusqu’à la fin! ;-)

Note : l’idée de ce billet est né grâce à un tout nouveau groupe Facebook pour les voyageuses : ça rentre pas dans mon sac. J’ai eu envie de faire un commentaire sur la préparation des bagages et je me suis rendue compte que j’avais vraiment trop de choses à dire!

Toutes les photos sont extraites de Pixabay.