Voyager seule au Maroc

Publié le 26 septembre 2014 par Severine @NativeduMonde


Suite à mon article dans lequel je vous racontais ma première expérience de voyage solo, vous avez été quelques unes à me poser des questions plus précises sur le Maroc.Je vais donc tenter d'y répondre à travers cet article puisque vos questionnements, qui étaient aussi les miens, intéresseront peut-être certaines autres en passe de franchir le pas.Avant toute chose, il est important de préciser qu'il ne s'agit que de mon expérience, vécue dans les endroits où je suis allée, à savoir la ville de Marrakech, la vallée de Tighdouine et celle d'Imlil dans l'Atlas, et Essaouira. Je n'ai pas parcouru la totalité du pays, bien loin de là, et je vous conseille, comme avant tout voyage, de vous renseigner au préalable sur la région que vous souhaitez visiter.

Les sollicitations commerciales...

Je ne vais pas vous cacher que vous serez beaucoup sollicitées, en ville et dans les souks notamment, pas parce que vous êtes une femme, mais parce que vous êtes une touriste, que vous le vouliez ou non.On vous conseillera peut-être d'ignorer ceux qui vous abordent, mais personnellement je n'aime pas l'idée, je trouve ça assez méprisant à vrai dire. Un petit sourire, un petit bonjour et une allure franche et décidée m'ont permis de passer au travers des sollicitations sans problème.Parfois, je dois le dire, j'ai été fatiguée et irritée de ne pas pouvoir marcher tranquillement... Jusqu'au jour où j'ai éclaté de rire en pleine rue! C'était un matin pluvieux à Marrakech, et en ouvrant la porte de ma chambre, je me suis dit que je serais sûrement tranquille pour marcher dans la ville. Sauf qu'à peine deux pas plus loin, on me proposait de me vendre un parapluie! Ca m'a fait marrer de constater que les ressources des marocains étaient inépuisables! Je l'ai d'ailleurs signalé au vendeur qui a sourit aussi, et qui m'a répondu "le travail, madame, ne connaît pas la pluie".Entendre et voir cet homme s'acharner à sa tâche quotidienne pour gagner des clopinettes j'imagine, a suffit à me faire intégrer le principe et ne pas me sentir agressée à chaque approche. Ces gens font leur métier, avec les motivations et les codes de communication qui leur sont propres.

Les négociations de prix...

Quand on vous dit ici que négocier, c'est un peu le sport national marocain, croyez-le. Et ça l'est d'autant plus à Marrakech... Mais pour négocier, ça implique d'être renseigné, du moins de savoir de quoi on parle. Je ne vous conseille pas de proposer un prix dérisoire, j'ai testé, et j'ai regretté. Je cherchais un porte savon en inox (oui il y en a qui cherchent des babouches, moi c'est un porte savon...), je ne me souviens plus du prix que j'ai proposé, équivalent à un euro peut-être... Bref, le vendeur m'a demandé de sortir de sa boutique en me précisant qu'on ne vendait pas des tomates ici. J'ai eu honte. Déjà parce qu'il y avait du monde autour, mais surtout parce que, de toute évidence, il ne s'est pas senti respecté dans son travail, et je le comprends.Par la suite, avant d'acheter et donc d'entamer les négociations, je faisais un tour pour me rendre compte à peu près des tarifs, et je comparais. Et quand j'informais le vendeur de ma démarche, il me proposait souvent un bon prix.

Les arnaques...

Si vous saviez le nombre de fois où je me suis faite arnaquée sur les prix! :) Et ça a commencé dans le tout premier taxi que j'ai pris, en sortant de l'aéroport de Marrakech. Pour resituer le contexte, mon avion avait plus de quatre heures de retard et je suis donc arrivée de nuit. Donc je résume, mon premier voyage solo, dans une ville inconnue, de nuit... Et le chauffeur de taxi qui me demande deux cents dirhams (soit dix-huit euros) pour rejoindre la médina... J'ai accepté sans broncher.Arrivée à destination, le chauffeur m'a indiqué le chemin de l'hôtel situé à quelques rues, inaccessibles en voiture. Je lui ai donné les deux cents dirhams en lui signalant que je ne connaissais pas les tarifs usuels, que j'étais fatiguée, pas aguerrie de cette ville inconnue pour moi, mais que j'avais la conviction que le tarif était exagéré. J'ai même rajouté, avec un ton très particulier entre humour et désespoir, que ce n'était pas très beau d'accueillir les touristes de la sorte, et que, c'est un fait, il serait à tout jamais la première personne qui m'a accueillie dans ce pays... Bon je vous l'accorde, j'en ai fait un peu trop, mais pour le contexte, reportez-vous quelques lignes plus haut! :)Toujours est-il qu'il est sorti du taxi, a demandé à un type de surveiller la voiture, a pris mon bagage dans le coffre, et m'a gentiment accompagnée jusqu'à l'hôtel, demandant au gérant de m'accompagner chercher à manger. Et franchement, j'ai trouvé ça d'une extrême bienveillance. M'accorder du temps et de la considération, ça vaut tous les dirhams du monde. 

Des marocains que j'ai croisés ensuite, beaucoup font la différence entre l'argent et les valeurs humaines. Pour eux, "arnaquer", ce n'est pas mépriser, c'est le commerce c'est tout. L'argent, c'est vital, mais ça n'a rien à voir avec le respect et les sentiments qu'ils portent à leurs interlocuteurs. Et je trouve ça beau au fond, de faire cette distinction.

J'ai appris plus tard, que la majorité des chauffeurs de taxi à Marrakech n'étaient pas indépendants, qu'ils travaillaient pour une entreprise. Leur salaire est donc nettement moindre que ce nous leur donnons au final.

J'ai aussi appris plus tard, en sortant de Marrakech, que les marocains nommaient eux-mêmes cette ville "Arnakech", ça donne une idée...

Avec les hommes...

Vous n'échapperez pas aux "vous êtes très jolie la gazelle" et autres compliments au détour d'une rue, mais ils sont restés en ce qui me concerne très respectueux. Le mieux à faire je pense, est de sourire tout en marchant d'un bon pas, ce qui ne laisse pas de place à l'ambiguïté.

Dans la rue justement, si vous demandez votre chemin, notamment dans la médina, la plupart des hommes, puisque ce sont souvent des hommes que j'ai croisés dans la médina, vous accompagneront à destination.

J'ai eu l'occasion de voyager collé-serré avec certains dans les taxis collectifs, très collectifs, et jamais un geste déplacé n'a été fait à mon égard. Ils me laissaient même souvent la meilleure place, à savoir être assise sur le frein à main avec un coussin sous les fesses, tandis que le chauffeur passe ses vitesses sous ta cuisse gauche que tu dois lever à chaque fois... C'est dire si les voyages en taxi collectifs sont conforts! :)

J'ai quelquefois discuter avec des hommes marocains, discuter sérieusement je veux dire. Ils m'ont souvent posé des questions sur ma vie en France, mais je n'ai jamais senti autre chose que de la curiosité saine, une envie de savoir, et surtout une envie de partage. Certains m'ont raconté à leur tour ce qu'ils vivaient dans leur quotidien avec beaucoup de pudeur, les traditions qui évoluaient et qui les impactaient, souvent d'une bonne manière selon eux, et ce qu'ils connaissaient de la France.Je ne saurais quoi vous dire davantage si ce n'est que, non seulement je n'ai personnellement rencontré aucun problème avec les hommes au Maroc, mais que j'ai apprécié leur compagnie.

Avec les femmes...

Pardon messieurs, mais les rencontres avec les marocaines furent probablement les plus riches en ce qui me concerne. Disons qu'à leur contact, j'ai bouleversé certaines de mes représentations que j'avais quant à la condition des femmes au Maroc. J'en ai déjà parlé sur ce blog, alors je ne ferais pas de redite, mais elles sont d'une joie de vivre incroyable, et c'est d'autant plus vrai quand elles se réunissent, quand elles sont entre elles.

La plupart sont relativement pudiques, mais vous parviendrez facilement à entrer en relation avec elles, justement parce que vous êtes une femme. Une fois le contact établi, par un regard ou une parole, elles vous ouvriront les portes de leur quotidien sans retenue, vous enlaceront dans les taxis, vous feront goûter, que dis-je, manger tout ce qu'elles cuisinent. Elles aussi m'ont beaucoup questionnée sur ma vie quotidienne, et sur le fait que je voyage seule.

S'il y a peut-être une différence à voyager en étant une femme plutôt qu'un homme au Maroc, je pense qu'elle réside dans le contact avec les marocaines. Et vous voyez, c'est plutôt un point positif! Cela dit, je n'ai jamais eu l'occasion d'en discuter avec des voyageurs solo, masculins je veux dire, leur point de vue sera évidemment le bienvenu ici.

Et la sécurité alors...

Parce que, finalement, les peurs et interrogations qu'on peut avoir vis-à-vis d'une destination quand on voyage seule tournent principalement autour de ça, et c'est normal. Mais soyez en sûres, votre bon sens et votre intelligence intuitive vous éloigneront d'un paquet d'ennuis.

Ce que j'appelle le bon sens, c'est dans un premier temps de ne pas faire ce que vous ne feriez pas dans votre ville, c'est un principe que j'applique partout où je vais, et ça me semble être la base. Pour illustrer, je ne me promène pas en mini jupe talons aiguilles, seule, à quatre heures du matin, alcoolisée... Ni dans ma ville, ni dans aucune autre. Il est également important de bien vous renseigner des quartiers que vous voulez fréquenter. En ce qui concerne la médina par exemple, les rares fois où je me suis baladée de nuit, après 23h j'entends, j'étais accompagnée de marocains, et contente de l'être. Je ne dis pas que c'est dangereux, je dis juste que personnellement, je ne me sentirais pas à mon aise de traverser la médina en pleine nuit.D'ailleurs, si vous arrivez de nuit, réservez plutôt un hôtel dans Gueliz, ou dans la médina si vraiment vous y tenez, mais assurez-vous que le chauffeur de taxi pourra vous déposer devant, et pas quelques rues plus loin comme moi. Ca vaut aussi pour le fait que la médina est un vrai labyrinthe et que vous pourriez vous perdre à peu près un million de fois avant d'arriver... Sans compter que certaines rues et hôtels ne sont tout simplement pas indiqués.  En ce qui concerne les vols, je n'en ai heureusement pas été victime au Maroc. Pour minimiser les risques, je me suis rarement baladée en ville avec mon appareil photos autour du cou, je le protégeais avec un foulard et je le glissais dans mon sac bandoulière, avec mes papiers d'identité et l'argent. Quant aux objets de valeurs, financières ou sentimentales, hors de question qu'ils quittent mon appart en France. Je suis bien trop distraite et maladroite pour risquer de les perdre ou de les casser, ce qui évite en plus que je me les fasse voler.Pour le reste, quand je ne suis pas à l'aise avec quelqu'un ou quelque part, je m'en vais. Au final, je ne sais jamais s'il y avait un danger réel, mais dans le doute, et en imaginant le pire, je ne préfère pas savoir. Ce fut le cas à Tighdouine par exemple, comme je vous l'expliquais ici, et j'ai quitté cette ville qui ne présentait pourtant aucun élément de danger concret. Je n'étais pas à l'aise, alors je suis partie, c'est aussi simple que ça. C'est ce que j'appelle l'intelligence intuitive, et je pense que, tout au long de notre vie, on oublie trop souvent de nous dire de faire confiance à ce qu'on ressent, tout simplement. Et n'oubliez pas que fuir le danger est de loin la meilleure technique pour ne pas l'affronter... C'est stupidement évident, mais je crois que c'est une bonne chose à avoir en tête, en toute circonstance.


Ce que je retiens, c'est que voyager seule au Maroc ne m'a pas semblé présenter plus de risques que pourrait en rencontrer une touriste étrangère en France.

S'il y a une chose dont je suis convaincue, c'est que quel que soit l'endroit du monde où nous nous trouvons, en France ou ailleurs, là où il ne faut pas être seul(e) touriste, il ne faut pas être deux touristes non plus, homme ou femme. S'il y a danger, il est présent, qu'on soit seule ou pas.
Pour être plus précise, les risques que vous pourriez rencontrer seule au Maroc, ne seront ni plus ni moins les mêmes que ceux rencontrés par un homme, ou que vous pourriez tout aussi bien rencontrer avec un compagnon de route.

Encore une fois, je partage avec vous mon expérience, ce que j'ai vécu, et la manière dont j'ai réagi. A votre charge maintenant de composer avec celle que vous êtes, ce que vous lirez ici, et ailleurs.

Et surtout, je n'insisterais jamais assez, FAITES-VOUS CONFIANCE.