Si il y a une chose qui me manque en Angleterre, ce n’est pas le fromage (du coup, je ne comprends pas du tout pourquoi je m’empiffre comme une folle depuis qu’on est en France…). Ce sont les soirs d’été, quand il a fait une chaleur étouffante toute la journée, et qu’on a vécu calfeutré dans une demi pénombre, à l’abris de lourds volets de bois. Le soir arrive et on ouvre enfin, on sort sur les terrasses en clignant les yeux, à moitié aveuglés par le soleil couchant, au son des grillons. L’odeur des pins, la couleur du ciel…c’est l’été de mon enfance.
(Flickr.com)
Je suis donc toute contente de faire partager ça à ma troupe d’anglais. Déjà, ça commence fort. Cette année, il ne fait pas meilleur que chez nous, en Angleterre. Ce que n’a pas manqué de me faire remarquer L’Ado. Elle est bien gentille maman, avec ses histoires de canicule, mais c’est le floc qui a du lui monter à la tête. (C’est un alcool landais, ça ressemble au pinot charentais). On a quand même tenté le repas du soir sur la terrasse. Hurlements de banshee de princesse 2, Pré Ado en a lâché la baguette de pain dans la piscine (au cas où l’expérience vous intéresse: ça flotte un peu, en rond et ça finit par couler).
-Mamaaaaaaaaaan y’a une dragon!!!!
-on dit un dragon, c’est quoi encore cette histoire?
-mais euh, mamaaaaaaaan, j’ai vu un dragon dans la garden!
Pré Ado, abandonnant définitivement son pain au fond de l’eau, est parti enquêter. Il est revenu, formel, sa sœur est nulle. Ce n’est pas un dragon, c’est un dinosaure bonsaï. C’est cool la France, ils ont des animaux rigolos, les autres sont venus s’extasier aussi. Voilà comment mes enfants ont failli faire mourir d’une crise cardiaque un malheureux lézard.
L’Ado connaît déjà, il ne s’est pas démonté pour si peu, et s’est tranquillement installé à table, un pied de chaise dans une fourmilière, un coude dans les rillettes, la mèche sur le nez et a attaqué le camembert distraitement, avec la cuillère de bébé 5. Après les agapes, les enfants ont quand même été étonnés qu’il fasse encore assez jour et assez bon pour rester dehors. Et j’ai enfin eu mon soir d’été…les uns jouaient au ping pong, les autres couraient gentiment autour de la piscine (volet fermé cette fois, on ne va pas y passer le contenu du garde manger!) et les adultes savouraient leur café en admirant le coucher de soleil. De loin, on aurait dit une pub pour la famille parfaite en vacances. De très loin. De plus près, les deux grands se disputaient à coup de raquettes de ping pong, L’Ado inventant des règles au fur et à mesure. Princesse 1 servait dans son dos, en hurlant que ce jeu était débile, et que c’est pas juste. Bébé 5 s’interressait de très près à la fourmilière, et renversait gentiment dessus son gobelet. Il vient de découvrir la natation, ça l’enthousiasme et comme il est très généreux, il partage sa joie, même avec les fourmis. Princesse 2 avait entrepris de constituer un tas d’aiguilles de pin sèches sur le volet de la piscine, et voulait savoir si elle pouvait y mettre le feu avec une loupe. Cette enfant à un esprit très scientifique.
Profitant d’un instant d’inattention des gardiens parents, occupés à arrêter toute tentative d’incendie, Pré Ado essayait de servir directement dans l’oreille de son frère, avec une boule de pétanque au lieu d’une balle de ping pong. Princesse 1 fracassait de rage sa raquette contre le mur. Ça rebondissait dans le tas d’aiguilles de princesse 2 qui s’est mis à pleurer. Bébé 5 a trouvé ça très drôle et a voulu escalader la table de ping pong pour participer aussi.
Là dessus, un moucheron s’est suicidé dans mon café. Ça a été l’insecte qui a fait débordé le vase de ma nostalgie. Finalement les soirs d’été de mon enfance, c’est très surfait. Où est le floc?
(L’image vient de là)